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écrivit sur la politique et l’histoire, et obtint la faveur de la cour en défendant les principes monarchiques et religieux. Il fut chargé de rédiger divers traités d’éducation pour les petits-fils de Louis XV, fut nommé bibliothécaire de la reine, historiographe de France, et forma, en cette qualité, un précieux dépôt de chartes et de législation. Ses principaux écrits sont : l’Observateur hollandais, 1755-59, espèce de journal politique en forme de lettres ; Mémoires pour servir à l’histoire des Cacouas, 1757, écrit satirique où il bafoue les philosophes ; Leçons de politique, de morale et de droit public, puisées dans l’histoire de notre monarchie, 1773 (rédigées pour l’instruction des enfants du Dauphin) ; les Devoirs d’un prince ou Discours sur la justice, 1775, ouvrage justement estimé ; Principes de morale publique ou Discours sur l’Histoire de France, 21 vol. m-8, 1777-89, ouvrage non achevé et déjà trop étendu ; Exposition et défense delà constitution française, 1789.

MOREAU (J. Michel), dessinateur et graveur, né à Paris en 1741, mort en 1814, étudia sous Lebas, obtint la protection de Caylus, fut nommé en 1770 dessinateur du cabinet du roi, en 1788 membre de l’Académie, et en 1797 professeur aux écoles centrales de Paris. Il a dessiné et gravé plus de 2000 pièces, entre autres de nombreuses estampes pour les œuvres de Voltaire, J. B. Rousseau, Molière, La Fontaine, Racine, Delisle, etc. Les dessins de cet artiste sont remarquables par la science, l’élégance, le goût ; il s’inspire très-heureusement de l’esprit de l’ouvrage auquel il les destine.

MOREAU (J. Victor), l’un des plus grands généraux de la République, né à Morlaix en 1763, était fils d’un avocat. Il suivit d’abord la carrière judiciaire : il était prévôt de droit à Rennes en 1787. En 1792, il s’enrôla, conduisit un bataillon de volontaires à l’armée du Nord, où il servit sous Dumouriez ; fut nommé général de brigade dès 1793 et général de division en 1794. Il commandait alors sous Pichegru et concourut à la conquête de la Hollande. Mis en 1796 à la tête de l’armée de Rhin-et-Moselle, il repoussa l’ennemi au delà du Rhin, battit l’archiduc Charles à Rastadt et à Heydenheim et le força à se replier sur le Danube ; mais bientôt il se vit contraint de s’arrêter devant des forces supérieures, et effectua une belle retraite qui suffirait pour immortaliser son nom. Soupçonné d’entretenir des intelligences avec Pichegru, il fut disgracié par le Directoire et laissé pendant 18 mois dans l’inaction. Envoyé en Italie en 1799, il trouva l’armée dans une position difficile, et se vit obligé de se tenir presque toujours sur la défensive ; après la mort de Joubert, tué à Novi, il sauva les débris de l’armée par une savante retraite. Chargé de nouveau du commandement de l’armée du Rhin, il passa le fleuve en 1800, remporta plusieurs victoires sur les Autrichiens, repoussa le général Kray au delà du Danube, le battit de nouveau à Hochstædt, le força à signer l’armistice de Parsdorff, et, lors de la reprise des hostilités, remporta la victoire décisive de Hohenlinden, qui lui ouvrait les portes de Vienne : la capitale de l’Autriche ne fut sauvée que par l’armistice de Steyer. La paix de Lunéville met fin à cette glorieuse expédition, 1801. À cette époque, Moreau, mécontent du premier consul Bonaparte, en qui il ne voyait qu’un rival, commença à s’élever contre lui et noua des relations avec Pichegru et Georges Cadoudal. Il fut arrêté, et, à la suite d’un procès fameux, condamné en 1804 à une détention de deux années, qui fut commuée en un exil aux États-Unis. En 1813, Moreau, toujours irrité, accepta des propositions qui lui furent faites de la part de l’empereur de Russie, Alexandre, et consentit à porter les armes contre son pays, se flattant, disait-il de ne combattre que pour lui rendre la liberté. Il débarqua à Gothembourg le 24 juillet 1813 ; mais à peine était il arrivé au quartier général des alliés, devant Dresde, qu’il fut frappé, dans une reconnaissance, par un boulet qui lui emporta les deux jambes (26 août). Il mourut quelques jours après. A. de Beauchamp a écrit la Vie politique, militaire et privée du général Moreau, Paris, 1814. — Il faut craindre de confondre avec Victor Moreau le général René Moreaux, né en 1758 à Rocroy, qui s’illustra à la même époque : général de brigade en 1793, il commanda bientôt après l’armée de la Moselle, eut part à la reprise des lignes de Wissembourg, prit Kaiserslautern, Trêves, Coblentz, Rheinfels ; mais il mourut presque subitement en 1795, au moment de s’emparer de Luxembourg.

MOREAU (Jacq. Louis), dit M. de la Sarthe, médecin, né près du Mans en 1771, m. en 1826 à Paris, fut obligé par suite d’un accident d’abandonner l’exercice de son art et se fit écrivain. On a de lui : Essai sur la gangrène, 1796, Esquisse d’un cours d’hygiène, 1797, De la Vaccine, 1801, Histoire naturelle de la femme, 1803, et un Éloge de Vicq d’Azyr.

MOREAU (Hégésippe), né à Paris en 1810, m. en 1838, était enfant naturel et resta de bonne heure orphelin. Un de ses parents l’avait recueilli et placé dans un séminaire ; il en sortit à 15 ans, travailla quelque temps comme compositeur chez un imprimeur de Provins, puis abandonna son état pour venir à Paris, où il croyait que son talent poétique lui créerait une position brillante. Déçu dans ses hautes espérances, il tomba bientôt dans le découragement et la misère, et mourut de phthisie à l’hôpital de la Charité. Ce poëte précoce avait un véritable talent ; son style est plein de grâce et de fraîcheur. Trois mois avant sa mort il avait publié sous le titre de Myosotis le recueil de ses poésies.

MORÉE, Peloponesus, presqu’île qui termine la Grèce au sud. Cette presqu’île a environ 240 kil. de long sur 215 de large et 600 000 hab. ; elle est liée à la Hellade par l’isthme de Corinthe, et a pour bornes la mer Ionienne à l’O., l’Archipel à l’E., la Méditerranée au S., le golfe de Corinthe au N. Elle forma 5 provinces du roy. de Grèce : Argolide et Corinthie, Achaïe et Élide, Arcadie, Messénie, Laconie. Très-montagneuse, surtout au centre, la Morée est arrosée par plusieurs rivières, le Gastouni, le Vasili-potamo, le Roufia, etc. ; elle a une température et un climat très-variés ; le sol y est en général fertile : grains, vin, huile, fruits, surtout raisin et mûres. Abeilles, vers à soie, gros bétail, mouflons, moutons, chèvres, mais aussi beaucoup d’animaux farouches. Pêche lucrative ; commerce encore peu actif, mais qui peut le devenir infiniment. — La Morée doit son nom à l’immense quantité de mûriers (morus) dont elle se couvrit au VIe siècle. Ce pays, après avoir été longtemps indépendant et avoir formé plusieurs petits États (V. PÉLOPONÈSE), fit partie de l’empire romain, puis de l’empire d’Orient, fut, après la prise de Constantinople en 1204, occupé par les Français et par les Vénitiens, passa aux Turcs presque en entier de 1463 à 1479, leur fut repris par Venise en 1687, mais reperdu de nouveau en 1715, et définitivement cédé à la Porte par la paix de Passarowitz (1718). Les Turcs en firent l’eyalet ou pachalik de Tripolitza, qui était divisé en 19 cantons régis par des vayvodes, plus le Maïna, qui était indépendant de fait. Pendant le soulèvement de la Grèce contre les Turcs (1821-28), la Morée souffrit d’épouvantables ravages de la part des Turcs et des Égyptiens, commandés par Ibrahim ; enfin en 1828, une expédition française, sous les ordres du général Maison, mit fin aux massacres, chassa les Égyptiens de toutes les places du pays et en assura l’indépendance. — On doit à Buchon des Recherches sur la domination française en Morée, Paris, 1840-42. Une description complète du pays a été publiée en 1832 et ann. suiv., sous le titre d’Expédition scientifique de. Morée, par une commission de savants que le gouvernement français avait adjoints à notre expédition militaire.

MORÉE (Château de), fort situé sur la côte N. de la Morée, à l’entrée du golfe de Lépante, vis-à-vis du château de Roumélie, à 9 kil. N. E. de Patras. Bâti par Bajazet II en 1482, pris par les Français en 1828.