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veillance jusque sur la vie privée. Ces chefs président à l'éducation des enfants, infligent les pénitences, prononcent les exclusions, marquent le rang à chacun des frères dans l'une des trois classes qui composant toute communauté : les commençants, les progressifs et les parfaits. Les affaires qui concernent la société entière sont renvoyées devant la conférence des Anciens, qui siège à Bertholsdorf en Lusace, et qui doit rendre compte de son administration aux synodes, assemblés au moins tous les sept ans. Les Frères moraves, qu'on a justement surnommés les Quakers de l'Allemagne, se distinguent, comme eux, par leur union, leur douceur, leur piété austère et leur amour pour la paix. Ils portent un costume uniforme, d'une couleur foncée; ils cultivent avec succès l'industrie et les arts, surtout la musique. Ils possèdent des établissements non-seulement en Allemagne, mais en Suisse, en Angleterre, en Hollande, en France, en Russie, aux Indes, dans les colonies danoises d'Afrique et d'Amérique, ainsi qu'aux États-Unis et au Groënland. Schulze a donné leur histoire dans le livre intitulé : Origine et organisation des Communautés évangéliques, Gotha, 1822.

MORAVIE, Mæhren en allemand, Morava en langue morave, prov. de la monarchie autrichienne, qui, jointe à la Silésie autrichienne, forme le gouvt de Moravie-et-Silésie, est située à l'E. de la Bohême, à l'O. de la Hongrie, au S. de la Silésie prussienne et au N. de l'Autriche : 26 080 kil. carrés; 2 000 000 d'hab. (dont les trois-quarts Slaves); ch.-l., Brünn (jadis Olmütz). Elle est divisée en 8 cercles: Brünn, Olmütz, Hradisch, Prerau, Iglau, Znaïm. Beaucoup de montagnes : les monts Sudètes qui forment la frontière de Silésie; les monts de Moravie, celle de la Bohême, et les monts Krapacks, celle de la Hongrie. Cette contrée est arrosée par la March ou Morava (qui donne son nom à la province) et par ses nombreux affluents; l'Oder et la Vistule y ont leur source. Elle est traversée par le chemin de fer de Vienne à Prague. Climat âpre, sol médiocrement fertile; gros bétail, moutons, chèvres, etc.; ours, loups dits Tysows, qui sont une espèce de loups-cerviers, et autres bêtes fauves. Argent, fer, cuivre, alun, soufre, vitriol, topazes et autres pierres précieuses, marbre, etc. Industrie active : toile, coton, lainages, papeteries, ustensiles de fer, etc. — La Moravie, habitée au temps des Romains par les Quades et les Marcomans, devint ensuite la demeure des Rugiens (d'où le nom de Rugiland qu'elle porta un instant), puis des Hérules, chassés d'Italie par Théodoric le Grand. En 548, des Slaves et des Bulgares vinrent s'établir sur les bords de la Morava et y fondèrent un roy. dit de Moravie, qui s'étendait à l'E. jusqu'au Gran, et qui ne tarda pas à tomber sous la domination des Avares. En 805, les Slaves secouèrent ce joug et se mirent sous la protection de Charlemagne; en 870, sous le règne de Zwentibold, le roy. de Moravie, reconstitué sous le nom de Grande-Moravie, comprenait, avec la Moravie actuelle, la Bohème, le Voigtland, la Misnie, la Lusace, le Brandebourg, la Poméranie, la Silésie, une partie de la Pannonie et de la Dalmatie; à la mort de Zwentibold, il se divisa et, après de longues luttes avec les États voisins, finit par être détruit et partagé entre l'Allemagne, la Bohême et la Hongrie (908). En 1056, la Moravie propre fut incorporée à la Bohème; lorsque la Bohême eut été érigée en royaume, la Moravie reçut le titre de margraviat (1086). Depuis ce temps, la Moravie ne fut plus détachée de la Bohême; elle passa avec elle en 1526 sous la domination de l'Autriche. Les Moraves avaient dès le IXe s. embrassé le Christianisme, que S. Cyrille était venu leur prêcher en 856. — V. ci-dessus MORAVES (Frères).

MORBIHAN, c-à-d. en breton Petite mer, petit golfe formé par l'Océan atlantique sur la côte du dép. du Morbihan, à son entrée par 5° 15' long. O., 47° 33' lat. N. Il a 18 kil. sur 8 et est parsemé d'un grand nombre d'îles. Vannes est à l'extrémité septentrionale.

MORBIHAN (dép. du), dép. de la France occid., sur le golfe qui lui donne son nom et sur l'Atlantique, au S. du dép. des Côtes-du-Nord, à l'E. de celui du Finistère, à l'O. de celui d'Ille-et-Vilaine : 6996 kil. carrés; 486 504 hab. ; ch.-l., Vannes. Il est formé d'une partie de l'anc. Bretagne. Côtes très-découpées : la célèbre péninsule de Quiberon, les îles de Groix et de Belle-Île font partie de ce département; landes incultes. Fer, plomb, cristal de roche, ardoises, pierres de taille, terre à potier; sable émeri. Grains de toute espèce, millet, lin, chanvre, beaucoup de cidre, un peu de vin; excellent beurre demi-sel. Bétail, chevaux, abeilles. Peu d'industrie; commerce maritime et de transit. — Ce dép. a 4 arr. (Vannes, Ploërmel, Napoléonville, Lorient), 37 cant, 228 comm.; il appartient à la 16e div. militaire, dépend de la cour imp. de Rennes et a un évêché à Vannes.

MORCELLI (Ant.), savant archéologue, né en 1737, à Chiari, m. en 1821, entra chez les Jésuites, professa l'éloquence à Rome (1771), s'attacha, après la suppression de son ordre, au cardinal Albani, qui lui confia le soin de sa bibliothèque, et puisa dans ce riche trésor les matériaux de savants ouvrages. Il retourna en 1791 à Chiari, y remplit jusqu'à sa mort les fonctions de prévôt du chapitre, et refusa un archevêché pour rester au milieu de ses compatriotes. Parmi ses ouvrages, on remarque : De stylo inscriptionum latinarum, Rome, 1780 (traité classique de tous les genres d'inscriptions, avec leurs formulés, leur style propre, et de nombreux exemples pris dans l'antiquité); Inscriptiones, 1783 (c'est un recueil d'inscriptions qu'il avait composées lui-même à l'imitation de l'antique); Antiquités de la villa Albani, 1785. Ses œuvres archéologiques ont été réunies à Padoue sous le titre d’Opera epigraphica, 1818-1835, 5 vol. in-4, et complétées par le Lexicon Morcellianum, Bologne, 1835, 3 vol. in-4.

MORDELLES, ch.-l de c. (Ille-et-Vilaine), sur le Meu, à 15 kil. S. O. de Rennes; 1500 h. Beau port.

MORE (Thomas), en latin Morus, grand-chancelier d'Angleterre, né à Londres en 1480, était fils d'un juge. Il brilla d'abord au barreau, entra au Parlement dès qu'il eut l'âge voulu, et fut introduit par le cardinal Wolsey auprès de Henri VIII, dont il gagna bientôt la faveur. Ce prince lui donna d'abord entrée au conseil privé, puis le nomma trésorier de l'Échiquier, et enfin, après la disgrâce de Wolsey, grand-chancelier (1529). Il remplit cette charge avec un zèle, une intégrité et un désintéressement sans égal; mais, ne pouvant approuver les réformes que le roi voulait introduire dans l'Église, il résigna les sceaux au bout de deux ans et se retira à Chelsea. Ayant refusé de prêter le serment de suprématie et de se séparer de l'Église romaine, il fut enfermé à la Tour de Londres; après plusieurs mois d'une dure captivité, il eut la tête tranchée, en 1535. Sa mort fut celle d'un martyr. Thomas More est un des génies les plus originaux, un des hommes les plus spirituels et un des meilleurs écrivains de son époque; il a laissé plusieurs ouvrages, les uns en anglais, les autres en latin, qui sont remarquables par la pureté et l'élégance du style. Le plus connu est son Utopie, intitulée : De optimo reipublicæ statu, deque nova insula Utopia, Louvain, 1516, ouvrage allégorique dans le goût de la République de Platon, où il propose des idées fort singulières sur le partage des biens, le suicide, etc.; il a été traduit en français par Gueudeville, 1715, et Th. Rousseau, 1780. Th. More avait aussi écrit la Vie de Pic de la Mirandole, — de Richard III, — d'Édouard V. Ses Œuvres ont été recueillies en 2 v. in-fol., Londres, 1559. et Louvain, 1566. Il avait rédigé des Mémoires qui n'ont été publiés qu'en 1808 en angl. par Cuyley, Londres, 2 v. in-4. Sa vie a été écrite par son gendre Roper, Oxford, 1716, par Th. Stapleton, son contemporain (trad. en français par Al. Martin, 1849), et de nos jours par Mackintosh, 1830.

MOREAU (J. N.), écrivain, né à St-Florentin en 1717, m. en 1804, fut d'abord conseiller; à la cour des comptes de Provence; vint ensuite à Paris, où il