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tait en sacrifices et en purifications dites Lustrations. Cette cérémonie fut instituée sous Servius Tullius, l’an de Rome 189 (565 av. J.-C.) — On appelait aussi lustre le dénombrement même, ainsi que l’intervalle de cinq ans qui s’écoulait entre deux dénombrements.

LUTATIUS CATULUS (C.), consul romain l'an 241 av. J.-C., livra aux Carthaginois une bat. navale entre Drépane et les îles Ægates : il leur coula à fond 50 navires et en prit 70. Cette victoire mit fin à la 1re guerre punique.

LUTATIUS CATULUS (Q.), consul, vainquit les Cimbres à Verceil en 101 av. J.-C., conjointement avec Marius; néanmoins il se déclara plus tard contre son ancien collègue; celui-ci, devenu maître de Rome, le mit au nombre des proscrits et le fit périr (86). — Q. Lutatius Catulus, son fils, consul avec Lépidus l'an 78 av. J.-C., s'opposa aux efforts de son collègue qui voulait, après la mort de Sylla, renouveler la guerre civile et le défit dans 2 combats. Il combattit les lois Gabinia et Manilia, qui conféraient à Pompée un pouvoir dangereux. Il fit rebâtir le Capitole qui avait été brûlé.

LUTÈCE, Lutetia Parisiorum, v. de la Gaule, dans une île de la Seine, est auj. Paris ou plutôt la Cité.

LUTEVA ou FORUM NERONIS, v. de la Gaula Narbonaise, chez les Volces Arecomici, est auj. Lodève.

LUTHER (Martin), chef de la Réforme en Allemagne, né en 1483 à Eisleben (Saxe), était fils d'un pauvre ouvrier mineur. Il étudia à Eisenach, entra en 1505 chez les Augustins à Erfurt, devint professeur à l'Université de Wittemberg, et fut en 1510 envoyé à Rome pour les affaires de son ordre. En 1517, le pape Léon X ayant publié des indulgences, et ayant chargé les Dominicains de les distribuer en Allemagne, les Augustins furent, dit-on, jaloux de ce choix, et Luther, qu'ils prirent pour organe, en vint à attaquer le dogme même des indulgences : il publia à cette occasion un programme contenant 95 propositions et qui trouva bientôt de nombreux approbateurs. Tetzel, chef des Dominicains, fit brûler ce programme; et le pape, après avoir vainement cité l'auteur à Rome, renvoya l'affaire devant le cardinal Caïetan, son légat à la diète d'Augsbourg. Caïetan tenta, mais inutilement, de faire rétracter Luther; il voulut alors le faire arrêter; mais celui-ci, instruit à temps, réussit à s'évader. Protégé par l'électeur de Saxe, il professa ouvertement des doctrines de plus en plus audacieuses : ne reconnaissant plus d'autre autorité que celle des livres saints, il attaqua le pape et l’Église romaine, les vœux monastiques, le célibat des prêtres, la hiérarchie ecclésiastique, la possession des biens temporels par le clergé; rejeta le culte des saints, le purgatoire, les commandements de l’Église, la confession, la dogme de la transsubstantiation, la messe et la communion sous une seule espèce, et ne conserva d'autres sacrements que le baptême et l'eucharistie sous les deux espèces. Léon X lança contre lui en 1520 une bulle d'excommunication, et ordonna en même temps de brûler ses écrits comme hérétiques; Luther, usant de représailles, livra aux flammes à Wittemberg la bulle du pape avec toutes les décisions émanées du St-Siége. Cité en 1521 devant la diète de Worms, il s'y rendit muni d'un sauf-conduit de l'empereur (Charles-Quint); mais là il refusa encore de se rétracter et fut mis au ban de l'empire. Il trouva un asile dans le château de Wartbourg près d'Eisenach, où l'électeur de Saxe, son protecteur, le cacha pendant plus de neuf mois. Il employa ce loisir à composer divers ouvrages pour répandre ses doctrines, et y entreprit, en 1522, une traduction de la Bible dans la langue vulgaire. Rentré à Wittemberg, il y recommença ses prédications, fit de nombreux prosélytes, attira dans son parti des princes puissants, entre autres ceux de Suède, de Danemark, de Franconie, de Hesse, du Palatinat, de Brandebourg, et réussit avec leur appui à faire accorder à ses sectateurs la liberté de conscience dans les diètes de Nuremberg (1523-1524) et de Spire (1526). Après de nombreuses vicissitudes, dans lesquelles cette liberté fut alternativement restreinte ou étendue (V. LUTHÉRIENS), il vit signer en 1532, entre les princes protestants et Charles-Quint, la paix de Nuremberg, qui accordait aux réformés la liberté de conscience jusqu'au prochain concile. Luther employa le reste de sa vie à répandre ses doctrines par ses écrits et ses prédications et à lutter contre les nombreuses sectes qui s'étaient formées au sein de la Réforme (V. CARLOSTAD, ZWINGLE, CALVIN, etc.). Il m. en 1546, peu après la convocation du concile de Trente. Dès 1525, il s'était marié et avait épousé une jeune religieuse, Catherine de Bora, qui lui donna plusieurs enfants. D'un caractère fougueux, irascible, indomptable, Luther n'épargnait pas à ses adversaires les injures les plus grossières; mais il avait une éloquence impétueuse, toute-puissante sur la multitude. Il a laissé un grand nombre d'écrits, dont plusieurs ne sont que des pamphlets suggérés par des circonstances. Les principaux sont : sa traduction allemande de la Bible; son Catéchisme, qui contient les principes de la Réforme; ses Sermons, des Commentaires bibliques; le traité De servo arbitrio, contre Érasme (il y nie le libre arbitre) , et ses Lettres. On a plusieurs éditions de ses œuvres, entre autres celles de Bœrner, Leipsick, 1728-40, 23 v. in-f.; de Walch, Halle, 1737-53, 24 v. in-4. La plus complète est celle qui a été publiée à Francfort de 1826 à 1856 par Plochmann et Irmischer en 67 vol. 8°. Sa Vie a été écrite par Melanchthon et par plusieurs autres auteurs. V. Audin a publié au point de vue catholique une Histoire de la vie, des écrits et des doctrines de Luther, 1840. Michelet a donné en 1835, sous le titre de Mémoires de Luther, des fragments de ses ouvrages relatifs à l'histoire de sa vie. Les doctrines de Luther ont été exposées et réfutées par Bossuet dans son Histoire des variations.

LUTHERBOURG, peintre. V. LOUTHERBOURG.

LUTHÉRIENS, partisans des doctrines de Luther (pour ces doctrines, V. ce nom). Le Luthéranisme date de 1517, époque à laquelle Luther commence a s'élever ouvertement contra l'autorité du St-Siége. Après avoir longtemps lutté contre les légats du pape et contre l'empereur Charles-Quint, les Luthériens, soutenus dès l'origine par des princes puissants (notamment l'électeur de Saxe et le comte Palatin), obtinrent quelques concessions aux diètes de Nuremberg (1523) et de Spire (1526); mais, ces concessions ayant été retirées dans une nouvelle diète tenue à Spire en 1529, ils protestèrent contre les résolutions de cette diète (d'où le nom de Protestants), et présentèrent en 1530 à la diète d'Augsbourg leur confession de foi. Cette confession, ayant encore été rejetée, les princes luthériens, dont le nombre s'était considérablement accru et auxquels s'étaient joints le roi de Suède (Gustave-Wasa), le roi de Danemark (Frédéric), le landgrave de Hesse, forment entre eux la fameuse ligue de Smalkalde (1530) : ils obtiennent de nouveau la liberté de conscience par un traité signé à Nuremberg (1532); mais, au bout de peu d'années, Charles-Quint leur déclare la guerre. D'abord il remporte sur eux la victoire de Mühlberg, en 1547, et les oblige, par l'édit temporaire connu sous le nom d’Intérim d'Augsbourg (1548), à se soumettre aux décisions du concile de Trente; mais il se voit obligé en 1552 de signer le traité de Passau qui permettait l'exercice libre du Luthéranisme dans tout l'empire. Cependant, les nouvelles doctrines eurent encore à lutter pendant près d'un siècle, et les contestations auxquelles elles donnaient lieu ne furent définitivement terminées qu'à la paix de Westphalie, en 1648. Aujourd'hui les Luthériens composent la majorité des populations en Suède, en Danemark, en Prusse et dans tout le nord de l'Allemagne. Le Luthéranisme se distingue du Calvinisme en ce qu'il admet la présence réelle, rejette la prédestination absolue, tolère les ornements religieux et conserve une sorte de hiérarchie. Cependant, depuis quelques années, ces deux sectes tendent à se fondre en uns seule sous le nom d’Église évangélique. V. ce mot.