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plète de ses œuvres a été publiée à Anvers, 1637, et Wesel, 1675. Un de ses principaux mérites est d'avoir fort bien fait connaître le stoïcisme.

JUSTICIER, haut fonctionnaire chargé de rendre la justice. V. ce mot au Dict. univ. des Sciences.

JUSTIN, historien latin, contemporain des Antonins, au IIe siècle, a rédigé un Abrégé de l'hist. univers, de Trogue-Pompée, en 44 livres : cet ouvrage, devenu classique, est plutôt un composé d'extraits de Trogue-Pompée qu'un résumé : les passages conservés se reconnaissent à la pureté et à l'élégance du style. Il a été publié dans les collections ad usum Delphini, Variorum, Lemaire, etc., et par Gravais, 1668, Wetzel, 1806, Ch. Frotscher, 1827-30. Il a été trad. en franç. par Cl. de Seyssel, 1559; par l'abbé Paul, 1774; par Pierrot et Boitard (coll. Panckoucke) et par Ch. Nisard (coll. D. Nisard).

JUSTIN (S.), dit le Philosophe, docteur de l'Église, né vers 103 à Flavia Neapolis (l'anc. Sichem) en Palestine, était d'abord païen et avait adopté la secte de Platon. Il reçut le baptême à 30 ans, et vint à Rome où il ouvrit une école de philosophie chrét. Dénoncé par le philosophe cynique Crescentius, il fut condamné à mort par le préfet de Rome, et subit le martyre vers l'an 168. On le fête le 13 avril. S. Justin a laissé plusieurs ouvrages, écrits en grec, entre autres deux Apologies de la religion chrét., un Dialogue avec le Juif Tryphon; il avait écrit un traité de la Monarchie de Dieu, auj. perdu. Ses Œuvres ont été publiées, gr.-lat., par dom Maran, Paris, 1742, in-fol., par Oberthur, Wurtzb., 1777, et par Otto, Iéna, 1847-50, 5 v. in-8; elles ont été récemment trad. en franç. par les abbés Chanut et Courcy. S. Justin pensait que le Verbe, qu'il identifie avec la Raison, s'était, avant son incarnation, révélé aux sages du paganisme; il était à la fois chrétien et platonicien. V. les Études de l'abbé Freppel (1860) et de M. Aube (1861) sur S. Justin.

JUSTIN I, dit le Vieux, empereur d'Orient, né en 450 en Thrace, avait été berger, puis soldat. Il parvint aux premières dignités sous l'empereur Léon : il était préfet du prétoire lorsqu'il fut porté sur le trône par une intrigue, à la mort d'Anastase, 518. Il régna sagement et apaisa pour un temps les querelles religieuses. Son règne fut troublé par les factions des Verts et des Bleus. Il mourut en 527, après s'être associé son neveu Justinien. — JUSTIN II, le Jeune, neveu de Justinien, lui succéda en 565. Il débuta bien, rendit un édit de tolérance et repoussa les Perses; mais il se livra bientôt aux débauches et à la cruauté et abandonna l'autorité à Sophie, son épouse, qui attira une foule de maux sur l'empire (V. NARSÈS). Il perdit la raison à la fin de sa vie, et mourut en 578. Il s'était associé dès 574 son gendre Tibère-Constantin.

JUSTINE, Flavia Justina Augusta, impératrice romaine, fille de Justus, gouverneur du Picenum, épousa successivement le tyran Magnence et l'emp. Valentinien (368), et fit, après la mort de ce dernier, proclamer Valentinien II, avec qui Gratien consentait à partager l'empire. Elle tenta d'établir l'Arianisme dans ses États; mais S. Ambroise empêcha l'exécution de ce projet. Le tyran Maxime ayant conquis une grande partie de l'Italie en 387, elle se retira à Thessalonique, où elle mourut en 388.

JUSTINE (Ste), vierge et martyre, patronne de la ville de Padoue, périt dans la persécution de Dioclétien. On la fête le 7 oct. — Une autre Ste Justine, martyre à Nicomédie en 304, est honorée le 26 sept.

JUSTINIANA, nom de 2 villes de l'empire d'Orient (Mésie), embellies ou agrandies par Justinien. V. TAURESIUM, ULPIANUM et GHIUSTENDIL.

JUSTINIEN I, empereur d'Orient, 527-565, neveu de Justin I, né en 483, à Tauresium en Mésie, d'un simple cultivateur, fut adopté par son oncle et lui succéda (527). Le règne de ce prince est célèbre par les querelles des factions du cirque dites les Verts et les Bleus, par les exploits de Bélisaire et de l'eunuque Nersès contre les Vandales d'Afrique (532-34) et les Goths d'Italie (535-50), ainsi que par les victoires du premier sur les Perses (528-32 et 540-62); mais il est surtout signalé par la réforme des institutions judiciaires: Justinien fit reviser par une commission de jurisconsultes, à la tête desquels était Tribonien, toutes les constitutions ou ordonnances de ses prédécesseurs, et en forma le code qui porte son nom (529). Le Code fut suivi du Digeste ou Pandectes, des Institutes et des Novelles (tous ces ouvrages ont été réunis sous le titre de Corpus juris civilis). Justinien s'occupa aussi des affaires de religion, mais avec plus de zèle que de lumières. Il fit rebâtir l'église Ste-Sophie à Constantinople, et ferma l'école philosophique d'Athènes. Ce prince avait épousé Théodora, femme célèbre par sa beauté, mais aussi par ses débauches, qui exerça sur lui un empire absolu et déshonora une partie de son règne. On lui reproche la disgrâce injuste de Bélisaire. L’Histoire de Justinien a été écrite par Isambert, Paris, 1856.

JUSTINIEN II, dit Rhinotmète (c-à-d. Nez coupé), emp. d'Orient, succéda en 685 à Constantin Pogonat, son père, à l'âge de 16 ans. En 694, ses sujets se révoltèrent, lui coupèrent le nez et l'exilèrent dans la Chersonèse de Thrace. Il resta en exil dix ans, pendant lesquels l'empire fut gouverné par Léonce et Tibère Absimare. Replacé sur le trône en 705 par Tribellius, roi des Bulgares, il périt assassiné en 711.

JUSTINOPOLIS, primitivement 'Ægida, auj. Copo d'Istria, v. d'Istrie, fut fondée par Justinien et ainsi nommée en l'honneur de Justin I.

JUTERBOCK, v. des États prussiens (Brandebourg), à 48 kil. S. de Potsdam; 5600 hab. Vieilles fortifications. Toiles, lainages, eau-de-vie, brasseries. Les Suédois, commandés par Torstenson, y battirent le général autrichien Gallas (1644). Combat entre les Français et les Prussiens (6 sept. 1813).

JUTES, anc. peuple goth de la Germanie, a donné son nom au Jutland.

JUTLAND, la Chersonèse Cimbrique des anc., Jutia ou Juetlandia en lat. mod., presqu'île du Danemark, bornée au S. par le Sleswig, au N. par le Skagger-Rack, et au N. E. par le Cattegat; 280 kil. sur 200; 640 000 hab. Le Jutland forme les stifts ou districts d'Aalborg, Viborg, Aarhuus, et Ribe. Quelquefois on étend le nom de Jutland au Sleswig, et l'on prolonge la péninsule jusqu'à l'Eider. Climat âpre, froid, humide; le sol est presque partout sablonneux ou marécageux. Dans la partie septentrionale s'étend un vaste golfe appelé Limfiord. La pêche, l'élève des chevaux, l'exploitation de quelques houillères et tourbières occupent surtout les habitants. — Le Jutland, jadis habité par les Cimbres, ce qui lui avait valu le nom de Chersonèse Cimbrique, le fut ensuite par les Jutes (tribu de Goths), d'où son nom actuel. Envahi en 1864 par l'armée austro-prussienne.

JUTURNE, sœur de Turnus, fut aimée de Jupiter qui lui donna l'immortalité. Elle laissa son nom à une fontaine qui coule près de Numicus.

JUVÉNAL, Dec. Junius Juvenalis, poète satirique latin, né à Aquinum, vers l'an 42 de J.-C, étudia sous Fronton et sous Quintilien, et fut quelque temps avocat. Il ne composa ses premières satires que sous Domitien, et ne les publia que sous Trajan et Adrien. Elles obtinrent un grand succès, mais la 7e (sur la Misère des gens de lettres) lui fut nuisible : un historien, favori d'Adrien, se croyant désigné par le poète, le fit reléguer à Syène, en Égypte, avec un commandement militaire. Juvénal mourut, à ce qu'on croit, dans cette espèce d'exil, à plus de 80 ans. Selon d'autres cependant, il serait mort à Rome. Nous avons de ce poète 16 satires, qui se font généralement remarquer par l'énergie de la poésie et la véhémence du style, mais aussi par l'enflure et l'exagération; ce qui a fait dire à Boileau :

Juvénal, élevé dans les cris de l'école,
Poussa jusqu'à l'excès sa mordante hyperbole.

Le poète se montre animé d'une généreuse indignation