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par les traits satiriques dont il les assaisonnait; puis il se mit à écrire, et emporté, par un zèle outre, il attaqua sans mesure tout ce qui lui paraissait contraire à la religion ou plutôt aux intérêts de son ordre : le poëte Théophile, l'historien Pasquier, l'avocat général Servin, le philosophe Charron furent les principaux objets de ses invectives. Cependant sa fin fut honorable : il mourut à Poitiers, d'une maladie contractée en visitant les malades de l'hospice. On a de lui : Doctrine curieuse des beaux esprits de ce temps, Paris, 1623; une Somme théologique, 1625, qui fut censurée par la Sorbonne, et une foule de pamphlets publiés sous de faux noms. Il a laissé des Mémoires, qui ont été publ. pour la 1re fois en 1860, à Paris, par M. Ch. Nisard.

GARAT (Joseph), né en 1749 à Bayonne, m. en 1833, était fils d'un médecin d'Ustaritz, près de Bayonne. Après s'être fait recevoir avocat à Bordeaux, il vint à Paris, s'y lia avec les philosophes, et se fit bientôt connaître avantageusement par ses Éloges de l'Hôpital, 1778; de Suger, 1779; de Montausier, 1781; de Fontenelle, 1784, dont les trois derniers furent couronnés par l'Académie; il écrivit en même temps dans le Mercure, dans le Journal de Paris, et fut chargé du cours d'histoire au Lycée, qui venait d'être fondé (1785). Envoyé aux États généraux (1789) par les pays basques comme représentant du tiers état, il devint sous la Convention ministre de la justice, et remplaça Danton après les massacres de septembre (12 octobre 1792) : il eut en cette qualité la cruelle mission de lire à Louis XVI sa sentence. Il accepta peu après (14 mars 1793) le portefeuille de l'intérieur, que quittait Roland, mais il montra dans cette haute position peu de fermeté et de clairvoyance, et la quitta au bout de peu de mois. Il fut peu après jeté en prison et n'en sortit qu'au 9 thermidor. Appelé en 1794 aux écoles normales, il y fit des leçons fort brillantes sur l’Analyse de l'entendement. Élu en 1796 membre du Conseil des Anciens, il se laissa nommer sénateur, puis comte par l'empereur Napoléon. Esprit profond, bon écrivain, Garat était faible comme homme politique : on a dit que c'était un jacobin malgré lui. Outre ses Éloges, il a publié des Considérations sur la Révolution, 1792; des Mémoires sur la Révolution, 1795, où il explique sa conduite; des Mémoires sur Suard, son ami, 1820, et a laissé en manuscrit des Éloges de Bossuet, de Condillac, de Montesquieu, et une Histoire des Basques. Membre de l'Académie des sciences morales dès la fondation (1795), il avait été en outre nommé en 1806 membre de l'Académie française; il en fut exclu sous la Restauration.

GARAT (Pierre Jean), célèbre chanteur, neveu du préc., né à Ustaritz en 1764, mort à Paris en 1823, vint dans la capitale à 20 ans, y excita par son talent un enthousiasme universel, et obtint la protection de la reine Marie-Antoinette et du comte d'Artois, qui le pensionnèrent généreusement. Réunissant tous les registres, doué d'une extrême flexibilité, il rendait avec une égale supériorité les scènes pathétiques et les airs sérieux ou bouffes de l'école italienne. Après avoir parcouru les principales villes de l'Europe, il revint se fixer à Paris, fut nommé en 1796 professeur au Conservatoire, et y forma un grand nombre de brillants élèves. Nourrit, Dérivis, Levasseur, Ponchard. etc. Il faisait lui-même des romances : tout le monde a répété celle dans laquelle il déplorait les malheurs de la reine Marie-Antoinette : Vous qui portez un cœur sensible, qui le fit arrêter en 1793. Ce grand artiste avait une extrême fatuité : il fut sous le Directoire le type des Incroyables.

GARAY (Jean de), général espagnol, né à Badajoz en 1541, passa en Amérique, et fut chargé de nouvelles explorations dans l'Amérique méridionale; découvrit, après avoir remonté le Parana, une immense contrée intérieure, et y fonda Santa-Fé-de-Véra-Cruz, sur les bords du Parana. Il fut nommé en récompense, par Philippe II, lieutenant général et gouverneur de l'Assomption (1576). En 1580, il rebâtit la ville de Buénos-Ayres, que les Indiens avaient détruite, et sut, par une conduite pleine de douceur et de prudence, y attirer les naturels eux-mêmes. Cependant, il fut massacré par quelques-uns d'entre eux pendant qu'il remontait le Parana, allant de Buénos-Ayres à l'Assomption (1592).

GARAY (don Martin de), ministre des finances d'Espagne, né en Aragon en 1760, mort en 1822, se déclara contre les Français lors de l'invasion, fut nommé en 1808 secrétaire général de la junte centrale, puis des Cortès (1810), et eut jusqu'à la rentrée de Ferdinand VII une part importante dans le gouvernement. Appelé au ministère des finances par Ferdinand VII en 1814, il voulut introduire d'utiles réformes et faire supporter au clergé et à la noblesse leur part des charges publiques; mais ces mesures, bien que nécessaires financièrement, soulevèrent l'opposition des parties intéressées : il perdit bientôt son crédit auprès du roi, et fut disgracié en 1818, emportant l'estime générale.

GARB, GARVE (c.-à-d. couchant), nom qu'avaient donné les Arabes à la partie S. O. du Portugal, qui en a conservé le nom d’Al-Garve. — On le donne proprement à la partie N. O. de l'empire de Maroc, située dans le roy. de Fez, sur le détroit de Gibraltar.

GARBIEH, prov. de la Basse-Égypte, dans le Delta, sur la Méditerranée, bornée à l'O. par celles de Menouf et de Rosette; à l'E. par celles de Damiette et de Mansourah: 130 kil. sur 65; 230 500 h.; ch.-l., Mehallet-el-Kébir.

GARCIA ou GARCIAS, nom de plusieurs comtes de Castille et de quelques rois de Navarre, dont on trouvera la série aux articles de ces royaumes; deux seulement méritent d'être mentionnes à part :

GARCIA I, comte de Castille, né en 938, mort en 990. Il succéda à Fernand-Gonzalès, son père, en 970, comprima la révolte des comtes de Véla, battit Almanzor à Osma en 984, et remporta sur les Maures plusieurs autres avantages, mais fut blessé mortellement et pris dans un dernier combat.

GARCIA I et II, rois de Navarre. V. NAVARRE.

GARCIA III, surnommé le Trembleur, roi de Navarre, fils de Sanche II, auquel il succéda en 994. Il combattit les Arabes, se ligua contre Almanzor avec Bermude, roi de Léon, et le défit à ta bat. de Calatanazor en 998. Il mourut en 1001, à l'âge de 43 ans. Quoique très-brave, il fut surnommé le Trembleur, parce que toutes les fois qu'il revêtait son armure un frisson involontaire s'emparait de lui : « Mon corps tremble, disait-il, du péril où mon courage va le porter. »

GARCIA IV, fils aîné de Sanche III, succéda à son père dans la Navarre et dans une partie de la Vieille-Castille (1035), repoussa Ramire I, roi d'Aragon, son frère, qui avait envahi ses États (1042), mais fut pris en trahison par un autre de ses frères, Ferdinand, roi de Castille (1054). S'étant échappé, il arma pour se venger, mais il périt dans une bataille la même année.

GARCIA DE PARÈDES (don Diego), capitaine espagnol, né à Truxillo dans l'Estramadure en 1466, fut le compagnon d'armes de Gonzalve de Cordoue, et partagea ses exploits et sa gloire dans les guerres d'Italie. En quittant ce pays, il alla retrouver Charles-Quint, dans l'armée duquel il combattit avec sa valeur ordinaire; mais il mourut peu après, des suites d'une chute de cheval (1530). Ce guerrier était d'une taille gigantesque et d'une force physique extraordinaire; pour la loyauté et la bravoure, il mérita d'être comparé à notre Bayard.

GARCIA (Manuel), compositeur et chanteur célèbre, né à Séville en 1779, mort à Paris en 1832, débuta à Madrid en 1801, et parcourut ensuite l'Espagne, l'Italie et la France, obtenant partout les plus brillants succès. Ses principaux opéras sont : il Califo di Bagdad (donné à Naples en 1812) ; l’Aubergiste, les Chevilles de maître Adam, le Poëte colporteur, Fin-