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terre, se fit connaître de bonne heure par de savants mémoires et de curieuses expériences de physique et d'économie rurale (on connaît surtout celle par laquelle il prouva la réalité des miroirs ardents d'Archimède) ; fut admis dès 1739 à l'Académie des sciences, et nommé la même année intendant du Jardin du Roi. Dès ce moment il se consacra tout entier à l'histoire naturelle. Profitant des ressources que lui offrait le grand établissement qu'il dirigeait et qu'il ne cessa d'enrichir, il entreprit de tracer le tableau de la nature entière. Son Histoire naturelle, dont les premiers volumes parurent en 1749, l'occupa tout le reste de sa vie. Placé par cet ouvrage au premier rang des écrivains aussi bien que des savants, Buffon obtint tous les genres de récompenses et d'honneurs : l'Académie française le reçut dans son sein en 1753; Louis XV le créa comte, et avant de mourir, il put voir sa statue placée à l'entrée du muséum d'histoire naturelle avec cette inscription : Majestati naturæ par ingenium. L’Histoire naturelle de Buffon, qui devait embrasser tous les règnes de la nature, ne comprend que les minéraux et une partie des animaux (quadrupèdes et oiseaux). Elle est accompagnée d'une Théorie de la terre, de Discours en forme d'introduction, et de suppléments parmi lesquels se trouvent les Époques de la nature, un des plus beaux ouvrages de l'auteur. Buffon eut pour collaborateurs dans cet immense travail, pour les quadrupèdes, Daubenton qui se chargea de la partie anatomique; pour les oiseaux, Gueneau de Montbeillard, Bexon et Sonnini. On s'accorde universellement a regarder les écrits de Buffon comme le plus beau modèle de la noblesse et de l'harmonie du style ; on reconnaît aussi qu'il a décrit avec une admirable fidélité les mœurs et les traits caractéristiques des animaux, qu'il a fait faire à l'histoire naturelle des progrès, soit par la nouveauté des vues, soit par la multitude de ses recherches, et qu'il a rendu d'immenses services en rassemblant une foule de matériaux épars et en propageant en France le goût pour l'étude de la nature ; mais on lui reproche d'avoir dédaigné ou même proscrit les classifications scientifiques, sans lesquelles il n'y a pourtant ni ordre ni clarté, et surtout d'avoir avancé des hypothèses hasardées (notamment dans ses Époques de la nature) : c'est ainsi qu'il suppose que la terre a été détachée du soleil par le choc d'une comète, qu'il explique la génération des êtres vivants par la supposition de molécules organiques et de moules intérieurs; qu'il attribue aux animaux un sens intérieur matériel, hypothèse plus inintelligible encore que le mécanisme auquel Descartes avait recouru. — L’Histoire naturelle fut imprimée d'abord à l'Imprimerie royale en 36 vol. in-4,1749-1788. Elle a été continuée dans le même format par Lacépède, qui a décrit les ovipares, les serpents, les poissons, les cétacés, 1788-1804. On a depuis réimprimé bien des fois Buffon et ses Suites. Les meilleures éditions, après l'édition princeps, sont celles de Lamouroux et Desmarest, 1824-1832, 42 vol. in-8, de Fr. Cuvier, 1829-1831, 42 vol., et de Flourens, 1854, 12 vol. in-8. — Outre l’Histoire naturelle, Buffon a donné une traduction de la Statique des végétaux de Hales, de la Théorie des fluxions de Newton, et a composé des mémoires et divers morceaux détachés, parmi lesquels on remarque son Discours sur le style, qu'il prononça pour sa réception à l'Académie française : il y donne lui-même la théorie de son style, et montre que le style est l'homme même. Sa Correspondance a été publiée en 1860, par son arrière-petit-neveu M. H. Nadault de Buffon. Vicq d'Azyr, Condorcet, Cuvier, ont écrit son Éloge; M. Flourens a donné l’Histoire de sa Vie et de ses Ouvrages; M. Nadault de Buffon: Buffon, sa famille et ses collaborateurs, 1863. — Pendant la Révolution, la gloire de Buffon ne put sauver son fils de l'échafaud : il expira adressant au peuple ces seuls mots : Citoyens, je me nomme Buffon.

BUG. V. BOUG. — BUGARONI. V. SEPT-CAPS.

BUGEAT, ch.-l. de cant. (Corrèze), à 26 k. O. d'Ussel; 736 hab.

BUGEAUD DE LA PICONNERIE (Thomas Robert), maréchal de France, né à Limoges en 1784, d'une famille noble, mort à Paris en 1849, s'engagea en 1804, fit avec distinction les grandes campagnes de l'Empire, se signala en Espagne, aux sièges de Lérida, de Tortose, de Tarragone, au combat d'Yéda (Murcie), où il enleva une colonne de 700 Espagnols avec 200 hommes, au col d'Ordal (Catalogne), où il anéantit un régiment anglais ; enfin en Savoie, à L'Hôpital-sous-Conflans, où il repoussa avec 1700 hommes un corps de 8000 Autrichiens (28 juin 1815). Après l'abdication de l'Empereur, il se retira avec le grade de colonel, et se livra, dans sa terre d'Excideuil (Dordogne), aux travaux agricoles. Rappelé à l'activité en 1830, il se dévoua à le nouvelle monarchie, réprima avec énergie en 1832 et 1834 de violentes insurrections dans Paris ; fut en 1832 chargé de commander la citadelle de Blaye, où était détenue la duchesse de Berry ; fut envoyé en 1836 en Algérie, et battit Abd-el-Kader sur la Sikkah (6 juillet), mais conclut avec lui en 1837 le traité de la Tafna, qui constituait la puissance de l'émir et qui, pour ce motif, fut vivement critiqué. Nommé en 1840 gouverneur général, il déploya dans ces fonctions les talents de l'administrateur aussi bien que ceux du guerrier : poursuivant sans relâche Abd-el-Kader, il réussit à l'atteindre en donnant à notre armée plus de légèreté et de mobilité, lui enleva Takedempt, Mascara, les forts de Boghar, Saïda, Thaza, le rejeta dans le Maroc, et mit le comble à sa gloire en remportant sur les Marocains la victoire d'Isly, où 10 000 Français défirent une armée quatre fois plus forte (14 août 1844). Nommé dès 1843 maréchal de France, il fut, à la suite de cette dernière victoire, fait duc d'Isly. Après avoir dirigé avec succès une expédition contre la Grande Kabylie, il commençait l'œuvre de la colonisation quand il crut devoir se retirer, mécontent de se voir contrarié dans l'exécution de ses plans (1847). Appelé par Louis-Philippe, dans la nuit du 23 au 24 février 1848, à la tête de la force armée, il se vit retirer son commandement peu d'heures après, au moment où il prenait des mesures énergiques pour sauver la monarchie. Investi après l'élection du 10 décembre de toute la confiance du Président de la république, il venait d'être nommé général en chef de l'armée des Alpes lorsqu'il fut enlevé par le choléra. Député de la Dordogne depuis 1831, Bugeaud porta dans nos assemblées nationales une parole rude, mais franche et pleine de sens. Comme général, on lui doit d'avoir introduit en Afrique une tactique appropriée à la nature du pays et de l'ennemi qu'il avait à combattre; il sut aussi, par sa sollicitude toute paternelle, gagner au plus haut degré l'amour et la confiance du soldat. Agriculteur en même temps que guerrier, il avait pris pour devise : Ense et aratro. Un double monument lui a été érigé, à Périgueux et à Alger. Son nom a été donné à un village de la province de Constantine (au S. O. de Bone). On a de lui quelques écrits sur l'Algérie, sur l'art militaire, et une relation de la bataille d’Isly (dans la Revue des Deux Mondes); en outre, il fit paraître en 1848 et 1849 les Socialistes et les Soirées du village, dans le but de combattre le communisme. M. A. Ponroy a publié en 1849 une Notice sur le maréchal Bugeaud.

BUGEY, petite province de France, à l'E. de l'Ain et à l'O. du Rhône, faisait partie des pays savoyards compris dans le grand gouvt de Bourgogne. Il se divisait en Bugey propre, Valromey, Michaille, et avait pour ch.-l. Belley. — Cédé à la France avec la Bresse en 1601, il fait auj. partie du dép. de l!Ain.

BUGUE (le), ch.-l. de c. (Dordogne), sur la Vezère, I à 23 k. N. O. de Sarlat; 1623 h. Serges, étamines; vins. Aux env. vastes grottes de Miremont.

BUHLE (J. Théophile), savant allemand, né à