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AUTOUR DE L’AFGHANISTAN

brûlés du spectacle qui frappe nos regards. Devant nous, la solitude morne et froide. La terre est nue, le ciel vide. Un vent continu, qui siffle lugubrement, balaye tout sur son passage et soulève en colonnes aveuglantes un sable rude qui obscurcit l’horizon. Rien n’existe, rien ne vit. C’est l’antre de la désolation où l’air lourd écrase la poitrine, où la bise glaciale qui vous frappe au visage semble vous repousser comme pour dire : « Tu n’iras pas plus loin ! » Pourtant il faut passer, lutter corps à corps avec la tourmente, braver la poussière, le froid, le manque d’eau. Minute longue et silencieuse, dont l’étreinte de mains fermes et confiantes a vite fait de chasser l’angoisse. Au fond de cette plaine aride et solitaire, c’est le grand lac de Kara-Koul dominé par les glaciers aux neiges éternelles. Du doigt je montre sur la carte à mes compagnons le point que nous devons atteindre, et comme on franchirait la porte de l’enfer, nous marchons vers la vie à travers ce désert de la mort.