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MELÆNIS


» Connais-tu cette vie effrayante et sublime,
» Ce triomphe d’un jour si lugubre et si beau,
» Ce dédain pour la foule, imbécile troupeau,
» Qu’au fond d’un bouge obscur la vieillesse décime ?
» Ces plaisirs, suspendus au penchant d’un abîme !
» Ces voluptés, râlant sur le bord d’un tombeau !

» Sais-tu la frénésie et toutes les tendresses
» Qu’à ceux qui vont périr la femme garde encor ?
» Sais-tu l’âpre bonheur d’abandonner au sort
» Un front tout bourdonnant de royales ivresses,
» Et de baiser ces mains aux lascives caresses
» Dont le pouce charmant demandera ta mort ?… »

Et Mirax, l’œil en feu, la narine gonflée,
Parcourait du regard le rhéteur ébloui ;
Paulus sentait sa vie à ce souffle ébranlée,