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ne pouvant s’obtenir par les demi-teintes, il préférait les caractères tranchés, les situations violentes, et c’est pour cela qu’il était bien un poëte tragique.

Son intrigue faiblit, quelquefois, par le milieu. Mais dans les pièces en vers, si elle était plus serrée, elle étoufferait toute poésie. Sous ce rapport, du reste, la Conjuration d’Amboise et Mademoiselle Aïssé marquent un progrès ; — et, pour qu’on ne m’accuse pas d’aveuglement, je blâme dans Madame de Montarcy le caractère de Louis XIV trop idéalisé, dans l’Oncle Million la feinte maladie du notaire, dans Hélène Peyron des longueurs à l’avant-dernière scène du 4e acte, et dans Dolorès le défaut d’harmonie entre le vague du milieu et la précision du style ; enfin, ses personnages parlent trop souvent en poëtes, ce qui ne l’empêchait pas de savoir amener les coups de théâtre, exemples : la réapparition de Marceline chez M. Daubret, l’entrée de dom Pèdre au 3e acte de Dolorès, la comtesse de Brisson dans le cachot, le commandeur à la fin d’Aïssé, et Cassius revenant comme un spectre chez l’impératrice Faustine. On a été injuste pour cette œuvre. On n’a pas compris, non plus, l’atticisme de l’Oncle Million, la mieux écrite peut-être de toutes ses pièces, comme Faustine en est la plus rigoureusement combinée.

Elles sont toutes, au dénoûment, d’un large pathétique, animées d’un bout à l’autre par une passion vraie, pleines de choses exquises et fortes. Et comme