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pas l’auteur ; le mot disparaît dans la clarté même de l’idée, ou plutôt, se collant dessus, ne l’embarrasse dans aucun de ses mouvements, et se prête à l’action.

Mais on m’objectera que toutes ces qualités sont perdues à la scène, bref, qu’il : « n’entendait pas le théâtre ! »

Les soixante-dix-huit représentations de Montarcy, les quatre-vingts d’Hélène Peyron et les cent cinq de la Conjuration d’Amboise témoignent du contraire. Puis il faudrait savoir ce qui convient au théâtre, — et d’abord reconnaître qu’une question y domine toutes les autres, celle du succès, du succès immédiat et lucratif.

Les plus expérimentés s’y trompent, ne pouvant suivre assez promptement les variations de la mode. Autrefois on allait au spectacle pour entendre de belles pensées en beau langage ; vers 1830, on a aimé la passion furieuse, le rugissement à l’état fixe ; plus tard, une action si rapide que les héros n’avaient pas le temps de parler ; ensuite, la thèse, le but social ; après quoi est venue la rage des traits d’esprit ; et maintenant toute faveur semble acquise à la reproduction des plus niaises vulgarités.

Certainement Bouilhet estimait peu les thèses, il avait en horreur « les mots », il aimait les développements et considérait le réalisme, ou ce qu’on nomme ainsi, comme une chose fort laide. Les grands effets