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Le soleil est pâle et sans force.
Du vieux poirier qui semble mort
Aucun bourgeon ne fend l’écorce,
Pointu comme une dent qui mord.

Seul le sorbier rouge, qu’assiége
Plus d’un loriot en passant,
Fait pleuvoir ses grains sur la neige ;
On dirait des gouttes de sang.

Mais, au dos de ma tasse pleine,
Je vois s’épanouir encor
Dans leur jardin de porcelaine,
Des marguerites au cœur d’or.

Parmi les fraîches impostures
Des vermillons et des orpins,
Sur le ciel verni des tentures
Voltigent des papillons peints.

Et mille souvenirs fidèles
Sortant du fond de leur passé,
Comme de blanches hirondelles,
Rasent tout bas mon seuil glacé.