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parvint sur la scène de l’Odéon qu’au mois de novembre 1856.

Ce fut une représentation splendide. Dès le second acte les bravos interrompirent souvent les acteurs ; un souffle de jeunesse circulait dans la salle ; on eut quelque chose des émotions de 1830. Le succès se confirma. Son nom était connu.

Il aurait pu l’exploiter, collaborer, se répandre, gagner de l’argent. Mais il s’éloigna du bruit, pour aller vivre à Mantes dans une petite maison, à l’angle du pont, près d’une vieille tour. Ses amis venaient le voir le dimanche ; sa pièce terminée, il la portait à Paris.

Il en revenait chaque fois avec une extrême lassitude, causée par les caprices des directeurs, les chicanes de la censure, l’ajournement des rendez-vous, le temps perdu, — ne comprenant pas que l’Art dans les questions d’art pût tenir si peu de place ! Quand il fit partie d’une commission nommée pour détruire les abus au Théâtre-Français, il fut le seul de tous les membres qui n’articula pas de plaintes sur le tarif des droits d’auteur.

Avec quel plaisir il se remettait à sa distraction quotidienne : l’apprentissage du chinois, car il l’étudia pendant dix ans de suite, uniquement pour se pénétrer du génie de la race, voulant faire plus tard un grand poème sur le Céleste Empire ; ou bien, les jours