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Mais que t’importe, à toi, le bruit que fait la foule ?
Sa rumeur éphémère est un flot qui s’écoule,
Tes beaux jours ne sont pas sonnés !

Ils viendront, ils viendront, quand, sur la capitale,
Soufflera mollement la brise orientale ;
Quand, sous sa mitre d’or, le pale citoyen
Traînant par le forum sa démarche indolente,
Secoûra les parfums de sa robe volante,
Comme un satrape assyrien.

Ils viendront quand, la nuit, l’impériale orgie
Jettera sous les cieux sa lueur élargie
Ou de sa chaude haleine embaumera les mers ;
Et tu t’éveilleras, et ton ombre sacrée
Viendra planer parfois sur les rocs de Caprée,
Au bruit des nocturnes concerts.

Ô martyr des festins ! le luxe d’Italie
Vengera largement ta mémoire avilie,
Et tu pourras surgir de la poudre du sol,
Le jour où fumera, sur la table romaine,
Un sanglier sauvage, à la sauce troyenne,
Plein de langues de rossignol.