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Des peuples qui vivaient les clameurs sont éteintes ;
Un bruit mystérieux frissonne dans les airs ;
L’éternel océan, de ses molles étreintes,
Caresse le berceau du naissant univers.

Près de la tombe immense où dort la race humaine,
Cherchant dans les débris un nid pour ses amours,
La nature s’éveille, impassible et sereine,
Et le temps sans pitié recommence les jours !

Comme un grand nénufar, le soleil immobile
Sur les vagues de l’aire entr’ouvre sa beauté,
Et son calice d’or fait, dans l’azur tranquille,
Tomber la transparence et la sérénité.

La lumière, en tous lieux, semble une eau qui circule,
Les contours sont noyés dans les rayonnements,
Et le jour sans nuage est comme un crépuscule,
A force de splendeurs et d’éblouissements.

Sur le monde enivré glisse une haleine chaude ;
On dirait qu’on entend, au réveil matinal,
Quand les bois font vibrer leurs feuilles d’émeraude,
Sonner joyeusement des notes de cristal.

L’escarboucle flamboie aux crêtes des collines,
De rubis empourprés les vallons sont couverts !
La brise, en balayant le sable des ravines,
D’or et de diamants poudre les gazons verts.