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Seul, le sage est debout, au seuil de sa maison,
Et d’un long regard triste il cherche à l’horizon,
S’il ne voit pas venir, du côté de la terre,
Le dernier ouragan plein du dernier tonnerre !
Déjà, sentant le jour de ses convulsions,
Le vieux chaos mugit sous les créations ;
La nature en travail écume dans sa chaîne,
Et le vent inconnu qui souffle de la plaine,
Comme ce cri d’adieu que l’Egypte rêva,
Passe sur les cités, disant : « L’homme s’en va !… »

C’est le commencement de la grande agonie !
Mourons ! les temps sont clos et la tâche est finie !
Montez tous à la fois, océans irrités !
Astres, détachez-vous des cieux épouvantés !
Et vous, formes de l’être, à jamais disparues,
Gigantesques débris que heurtaient les charrues,
Pressez-vous sur la terre, et dans vos lits poudreux,
Faites nous une place, ô frères monstrueux !…


VI

Tout ce qui fut la terre a disparu dans l’onde ;
Les grands flots ont roulé sur le sommet des monts,
Et le vieux lit des mers, où germe un autre monde,
Sous le soleil nouveau sèche ses noirs limons.