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Tout est calme et splendide, et porte la beauté
Dans sa force première et sa sérénité !
Le bananier puissant, qu’aucun souffle n’incline,
Sous l’ombre d’une feuille abrite une colline,
Et les lourds papillons d’azur et de carmin,
Au bord des grandes fleurs, se posant en chemin,
Répandent avec bruit, sur la mousse sauvage,
Les calices profonds où tient l’eau d’un orage !
Partout, l’orchis vivace, à l’écorce monté,
Des antiques rameaux couvre la nudité.
Au tronc rugueux des pins flottent des grappes roses !
Et, secouant à l’air ses corolles écloses,
La liane se roule en cercles tortueux,
Tandis que, par endroits, un cycas monstrueux
Fait jaillir en bouquet, de ses bulbes ouvertes,
Des feuillages légers comme des plumes vertes !
Cependant, l’araignée, au pied maigre qui fuit,
Noire, épaisse, velue, attentive à tout bruit,
D’une montagne à l’autre étend ses longues toiles,
Où la rosée éclate en humides étoiles !
Et, l’aile embarrassée aux mailles des réseaux,
Comme des moucherons se prennent les oiseaux !
Sur les sables luisant de baves argentées,
Des limaçons bossus, aux cornes dilatées,
Se traînent lentement ; les fourmis, en troupeaux,
Par d’obliques sentiers gravissent les coteaux,
Tirant avec effort, vers leurs greniers en cônes,
La datte violette et ses bananes jaunes !