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II

Entre deux rangs penchés de collines désertes,
Un golfe poissonneux ride ses ondes vertes ;
C’est un large marais, qui dort, sous le ciel clair,
Reste des grandes eaux, oublié par la mer.
Des madrépores blancs, garnis de coquillages,
D’une frange nacrée entourent les rivages,
Et l’éponge poreuse, attachée aux îlots,
Ouvre ses bouches d’or à l’écume des flots !
Dans les algues, au loin, par troupes répandues,
Avec leur dos bombé cheminent les tortues.
Les crabes inquiets, dont les doigts ont des dents,
Se glissent à fleur d’eau sous les rochers pendants,
Tout rampe et tout frémit sur la plage isolée…
Et, dressant jusqu’au ciel leur touffe amoncelée,
Près des minces bambous, enflés de nœuds égaux,
Les zamias fleuris couronnent les coteaux.
Le temps est calme et pur, l’essaim des brises douces
Sur les rochers velus fait frissonner les mousses,
Tandis que le soleil, étalant tous ses feux,
S’écrase, épanoui, dans la blancheur des cieux !

Tout à coup, s’élançant des cavernes profondes,
Une secousse forte a remué les ondes ;