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Il voit, il voit déjà, sur le sol âpre encor,
Frémir les bois touffus et rouler les blés d’or,
Tout tachetés de fleurs vermeilles ;
Il ne s’aperçoit pas, le rêveur ingénu,
Que mille taons jaloux, pour piquer son sein nu,
Vont bourdonnant à ses oreilles !

Puis, quand au foyer sombre il retourne, le soir,
Tous les petits enfants se pressent pour le voir,
Au seuil des fermes souriantes ;
Car, pareils aux grands bœufs qui rentrent à pas lourds,
Ses vers au large flanc font tinter, dans les cours,
Leurs colliers de rimes bruyantes.


Mars


 

Le printemps s’est hâté, mars en mai se déguise ;
Comme un hérisson fauve, il traîne le soleil
Qui lutte et fait trembler, au froid qui les aiguise,
Sur son dos frissonnant ses pointes de vermeil.

La brise a des chansons qui grelottent encore ;
Sous son capuchon rose enfermée à demi,
La fleur du marronnier regarde et veut éclore,
Puisque des pieds d’oiseaux sur sa branche ont frémi.