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tomes d’un Livret de Rêve et d’Amour. A cette époque, je voyageais en Suisse et l’étrange candeur de ces lieux me fit resplendir tendrement. De blanches bergeries me hantaient et je conçus l’extase glaciale de la montagne. En proie au charme de cette mélancolique région, j’ai écrit pendant cette période de sombres églogues bucoliques dont je puisai l’inspiration dans la vue des neiges étendues et qui me furent dictées aussi par mes sentiments intérieurs et par l’atmosphère que crée dans une âme la lecture amoureuse des bibles.

Au contact des sauvages blancheurs qui bouillonnent sur la pente des monts, je pus me purifier d’une manière insensible et je ressentis de divins vertiges. Quoique les travaux littéraires auxquels je m’essayai alors témoignent quelquefois du pire mauvais goût, on y peut pourtant discerner déjà une suave et ardente éloquence qui semble empruntée à l’écho des combes.

C’est que je n’ai jamais voulu repétrir ce chaos compact que figure assez, aux yeux des poètes, les riches horizons de la terre, mais contrairement à l’opinion courante, je ne prétends qu’à en traduire, avec une docile innocence, les plaintes, les gémissantes rumeurs,, le pompeux grondement de sourires. Dans cette situation d’esprit, je conçois des musiques sans nombre.

Il m’a toujours paru qu’un Chateaubriand, qu’un : Hugo, qu’un Gœthe, par exemple, s’étaient rendusinfininiment coupables en voulant, dominer le monde du charme de leur caractère. De même, malgré la suprême grâce en laquelle j’ai coutume de tenir des auteurs comme Voltaire et comme Jean Racine, je ne puis pas imaginer qu’ils aient écrit aussi véridiquement