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creuses corbeilles vertes et sonores sollicitent l’éclat des roses et des pommes.

De peur que ses prés ne demeurent sans fleurs, livides et froides ses jeunes moissons, il crie, il appelle l’aube et le printemps. 11 connaît la Nature ; et Dieu près de lui se dresse familier. En pure prière perpétuellement, il solemnise. Par le blé et le vin du sol, il se transsubstantie, énorme ! — Dehors, la prairie étendue reflète la blanche mobilité de sa maison.

Le hêtre et la haie bornent son horizon. Lui seul possède la clef de bronze pour la porte du paisible enclos. Là palpitent les abeilles, d’épais fruits d’or spongieux. Il les compte avec soin, les cultive, ’— clarté, acides senteurs, l’air blanc crépitant de chaleur, et les grandes meules frêles et opaques ! — A l’approche de l’automne il range dans la huche, par prudence, le bon pain, les grappes et le miel amer.

La configuration de sa propriété, les routes où courent ses charrettes d’or, l’étable et la charrue champêtre — une à une les fleurs — les fruits un à un — il a étudié son domaine comme moi et Socrate le plan intérieur de notre âme. Au reste il ne les distingue plus séparément ; ses pensées naissant de ses biens, il les mêle, ne les compare pas, identifiés !

Tout d’abord, peut-être, ce domaine lui apparut très monotone. Cependant, les herbages, de beaux oiseaux en pleurs, l’eau creuse soufflée en froides volutes, les luzernes par torrents, les fruits aux teintes vives, la forêt, parmi ces folles ivresses du sang, — exténué de palpitations, il sentit son coeur se gonfler d’amour. — Il distingue les affinités. — Ensuite il bâtit sa maison.