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taciturne ? Le sort qu’appelaient mes persuasifs désirs, nul doute qu’il n’eut point surpassé celui que me fait mon état. Au lieu de demeurer ici, sans réticence, j’inventai des plages, des pays où apparurent de faux héros pour l’accomplissement des conquêtes et les parades de la victoire. En de très féeriques provinces ils vinrent guerroyer et périr. Ils simulèrent les aventures convenues. Ils prirent tous les aspects auxquels je prétendis. C’est afin de me ressembler qu’ils furent des rois et des amants heureux, ces terrifiants pirates qui dépouillent les bateaux, d’atroces forbans parmi le sang et la bataille.

Voici cependant que nous lassent ces fables trop étranges. Il ne faut plus tromper le sort ! Sur de perfides tragédies, se dessèchent, s’éteignent nos passions.

Elles ne désignèrent, de l’homme, que ses ivresses rouges, ses pires frénésies. Le sang et le crime en sont l’élément.

Ces extraordinaires fictions nous ont fait communiquer avec toutes les peuplades humaines. — O les îles, les rocs, les iris ! Nous avons joué le rôle de l’ombre et de la mort. Mais qui donc construira des drames et des romans où le pathétique deviendra divin.

Rien de ce que Shakespeare déclame ne vaut l’odeur du pain cuit. Pourquoi solliciter des actions interdites. La douleur est-elle le terme de la vie. Et qui attendonsnous, à l’aurore et au soir, tandis qu’une pluie épaisse crépite ? Est-ce un guerrier ou une amante ? Regardez,