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pérorer parmi les carrefours ? Remplirait-il mieux sa mission humaine, ailleurs, là-bas, que dans l’échoppe patriarcale ? — Voilà la question, le lieu de ses doutes.

Dans le temps où il conduisait les blancs agneaux et l’innocence des animaux très doux paître aux prairies chaudes et houleuses, ce bel adulte qui sut ensuite paraître avec pudeur, dans la ,contenance d’un dieu, ne le pensez-vous point sublime. S’il nous semble à présent plus pur qu’à cette époque, ce n’est point d’être exquis, lucide, mais à cause de l’Amour que nous voyons en lui.

Toutes les vérités qu’il a proférées, n’importe quelle pièce de hêtre ou de pin les contient. Aussi son père sculpte, équarrit, tranquille. — La familiale cabane l’accueille de même qu’un obscur étranger. L’agneau et le chien, tout tremblants, le flairent. Les bêtes regardèrent d’un œil faux. L’escabeau et la table à fleurs reluisent, taciturnes comme ceux d’une auberge. Alors, Jésus distingua bien qu’il était l’hôte de ces artisans pauvres. Aucun de ses soupirs ne leur est familier. — Ayant donc rejeté leur pain, un jour, sans épouvante, il s’en alla.

Si ambitieux qu’il soit de triomphes et de hautes actions, la crainte qu’il a d’en accomplir d’où naissent de cruelles catastrophes, cela l’effraie et le touche. — Ah ! bouleverser la paix du bourg. — Prophétique, la montagne tremblante lui chuchote les secrets du monde.

De peur de froisser les abeilles, les petites splendeurs des campagnes, il hésite à les célébrer et il se tait. — Anxiété des races ! Se tromper d’état. Terreur