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Ni Shakespeare, ni Eschyle, ni même mes beaux récits pour lesquels, car je les créai, j’aurais dû avoir d’extrêmes indulgences, ni Angélique, ni Tliràséas ne sont parvenus à m’impressionner. Les péripéties qui me ravissaient cessèrent tout à coup de distraire ma peine. Hélas ! malgré tant d’aventures, je restai triste, tout éperdu ! Ma présomption prit un plus sombre accent. Décidément ces vains mensonges ne séduisaient. plus ma pensée. Je souhaitai qu’un héros véridique me parlât. Au lieu de modifier le mouvement de la terre selon le caprice d’une action et le pas d’un personnage faux, il me parut meilleur d’abandonner aux sites le soin d’en être les constructeurs. Je désirai l’eucharystie. Communions ! communions enfin ! me suis-je tout à coup écrié ! Après que j’eus reçu les songes, les flammes, les sens, le sang, les pulsations de tant de dieux et de seigneurs divers, ma mélancolie augmenta, je n’en pus supporter l’excès. J’eus honte de mes métamorphoses. Reclus dans un bourg de banlieue, au bord d’une lumineuse rivière, j’habitais alors cette petite maison que colorent des feuillages vermeils. Comme d’atroces passions m’agitaient, je les occupai aux labours et à de guerrières aventures. Ensuite Paul de Kock et Fénelon dissipèrent pourtant les fortes vapeurs rousses qui vacillaient encore au chaos de mon âme.

Sur ces entrefaites, je partis. — Ici tout devient réel. — De subites catastrophes ont frappé ma famille et l’on me persuada d’entreprendre des voyages. Une froide région de neiges m’a accueilli. Sur les rivages du lac de ïhoune, joyeusement scintillent des sapins, dont les troncs épais répandent l’âpre arôme des résines. Le