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le bilan du nationalisme

sur la tète blanche ! » A Toulouse, à la sortie du Pré-Catelan, il lui fallut passer entre deux files de forcenés dont les matraques s’abattaient sur lui. Partout où ils ont pu, les nationalistes ont substitué ainsi le hurlement à l’argument, et le coup à la parole. Et que leurs actions ne fussent rien encore auprès des intentions dont leur cœur est pavé, il est aisé de s’en rendre compte. Qu’on relise seulement ces « listes rouges », où les souscriptions destinées à glorifier Henry sont accompagnées de devises significatives : « De l’or aujourd’hui, du fer demain ! — Un groupe d’officiers qui attend impatiemment l’ordre d’essayer sur les 100.000 juifs qui empoisonnent le pays les nouveaux explosifs et les nouveaux canons. — Un prêtre infirme qui voudrait manier l’épée aussi bien que le goupillon. » Eugène Fournière nous invite avec raison, dans son livre sur L'artifice nationaliste, à ne pas oublier ces documents de psychologie morbide. Ils nous rappellent que depuis longtemps on n’avait vu s’abattre sur la douce France une tempête de bestialité aussi violente. C’est à cela que le nationalisme devait aboutir, en déchaînant les instincts furieux que foutre antisémite porte dans ses flancs.