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le bilan du nationalisme

à l'odeur ; « inférieurs en cela, dit-il, à leurs chiens et à leurs chevaux, qui décernent avec un si sûr instinct les diverses races de leur espèce. » Par où nous voyons jusqu’où l’on descend, quand on se laisse emporter par cette défiance de la raison qui caractérise le nationalisme. Contre les droits de l’humanité raisonnable, ceux qu’il fait valoir ici avec tant de vigueur, ce sont tout simplement les droits de la nature animale.

A quelles pratiques on aboutit lorsqu’on s’abandonne à cette pente, nous le savons de reste. Prêcher le respect et comme le culte des antipathies instinctives, c’est risquer de réveiller, en effet, l’animal dans l’homme et de restaurer le règne des impulsions brutales. Les Trublions, disait A. France, raniment tout ce qu’on croyait éteint chez l’homme civilisé et méditatif. Le vieux fond de barbarie et de férocité, ils le font remonter à la surface. Et ainsi avons-nous vu que les principales « scènes » du nationalisme furent des scènes de sauvagerie. Combien de fois le mot de Zola ne nous est-il pas revenu aux lèvres : « Ce sont des cannibales ! » Rappelons-nous seulement la courageuse campagne de conférences menée au début par M. de Pressensé. A Avignon, les organisateurs des bandes nationalistes le désignaient ainsi à leurs coups : « Sur la tète blanche ! Frappez