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solidarisme et libéralisme

Et ainsi poursuivra-t-il toute sa vie une libération qu’il n’atteindra jamais. Sa dette retombe sur lui chaque jour. C’est le rocher de Sisyphe. La limite qu’on impose, au nom d’une pareille théorie, à l’intervention sociale, ne saurait être qu’une limite essentiellement mobile.

Il faut ajouter que le socalisme pourrait protester qu’il a, lui aussi, et tout autant que le solidarisme, réservé du champ à la liberté individuelle. Lui aussi prétend faire deux parts dans la vie de l’homme. Lorqu’il dit que l’administration des choses se substituera au gouvernement des personnes, il entend que si l’activité des hommes doit être, sur certains points, plus justement réglée, elle en sera, pour le reste, d’autant plus sûrement émancipée. Pour lui aussi cette libération est le but. Il admettrait volontiers cette formule, qu’il s’agit moins de supprimer que d’universaliser la propriété, afin d’assurer à tous le minimum de puissance sur les choses sans lesquelles il n’est pas de liberté véritable ; et il compte bien qu’une fois toutes les précautions prises pour que l’exercice du droit de propriété ne puisse opprimer personne, chacun disposera, suivant son caprice, des biens qu’il aura légitimement acquis. Il prétend, en un mot, n’avoir jamais oublié que le but de l’organisa-