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solidarisme et libéralisme

Le solidarisme prétend n’augmenter de l’Etat que le pouvoir judiciaire : mais cela nous suffit, car en accordant à ce pouvoir judiciaire le droit de faire exécuter le quasi-contrat social, il consent à la plupart des mesures que nous réclamons pour rétablir l’équilibre entre déshérités et privilégiés ; il esl sur la pente du socialisme.

Le solidarisme compterait-il, pour l’arrêter au milieu de cette pente, sur le lien qui le rattache au libéralisme ? Mais on pourrait soutenir d’abord que le lien est par endroits singulièrement lâche ou du moins relâchable à volonté, quasi indéfiniment. Vous serez libre, nous dit-on, libre définitivement et absolument, quand vous serez quitte de votre dette sociale. Mais quand serai-je quitte ! Et qui pourra m’en assurer ! Entre ce qui revient à la société et ce qui me revient en propre, personne, a-t-on observé, n’est capable de faire le départ. Ma dette reste donc une somme indéterminée et que je ne sera i jamais sur d’avoir acquittée. Bien plus : ce que j’en sais de plus clair, c’est qu’elle est une quantité sans cesse croissante. Car je vis, et ma vie ne se soutient que par des emprunts journellement renouvelés. « Nul être, convient M. Bourgeois, n’est définitivement libéré ; par cela même qu’il continue de vivre, il devient de nouveau débiteur. »