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solidarisme et libéralisme

dont elle est capable ; c'est que seule elle est apte, comme le dit Maerterlinck, à produire ce fluide singulier qui s’appelle conscience, raison, bonté, justice, amour ; c’est qu’elle est, en un mot, l’instrument de la vie spirituelle. N'importe-t-il pas dès lors, si l'on veut que les hommes prennent l’habitude et le goût de ce respect mutuel qui devrait donner le ton à toutes les relations sociales, de leur rappeler le prix incomparable de cette vie supérieure ? C’est à peu près vers cette conclusion que paraît conduit, par les leçons mêmes de la pratique, un des meilleurs prédicants de la doctrine solidariste, M. Payot. Pour attacher les hommes les uns aux autres, il ne suffit pas de leur représenter que chacun d’eux doit à l’association la vie matérielle ; car cette vie matérielle n’est pas un bien pour tous. Mais si c’est un devoir pour tous de vivre, dans la mesure de leurs forces, de la vie de l’esprit, et si cette vie à son tour n’est possible que par la collaboration d’une civilisation, l’individu est dès lors solidement noué au groupe. Voulant l’expansion de la vie spirituelle, il voudra aussi la réalisation des conditions qui seules rendent cette expansion possible : ce sont ses devoirs envers lui-même qui lui auront fait mieux comprendre ses devoirs envers la société.

Ainsi apercevons-nous, derrière notre