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QU’EST-CE QUE LA SOCIOLOGIE ?

Pour être moins aisément observables, les transformations que les mœurs doivent aux formes sociales ne sont pas moins profondes, et l’expérience de tous les jours en donne au premier venu le sentiment plus ou moins vague. Ne disons-nous pas couramment que Saint-Pol a des « mœurs de petite ville » ? Et en effet le petit nombre des habitants n’explique-t-il pas comment ils se connaissent tous, comment ils surveillent réciproquement leurs faits et gestes, comment les moindres incidents de la vie des particuliers peuvent devenir, pour la ville entière, des « événements » ? N’est-ce pas un fait d’expérience que, plus un groupe est étroit, plus les prescriptions qu’il adresse aux individus sont nombreuses, détaillées, pressantes ? Le seul élargissement du groupe ne le force-t-il pas de borner ses exigences à des règles plus générales et plus abstraites ?

De même, le nombre comme la nature de ces règles varie suivant que l’individu appartient tout entier, corps et âme, à la société qui les formule, ou appartient à plusieurs sociétés en même temps. En ce sens, on pourrait soutenir que l’accroissement du nombre des sociétés dont l’individu fait partie le libère en quelque sorte de chacune d’elles. C’est ainsi que l’absolutisme de la famille diminue à mesure qu’augmente le nombre des sociétés nouvelles, métier, armée, état, confrérie religieuse, dans lesquelles ses membres se trouvent engagés. Le père romain pouvant avoir à s’incliner, sur le forum, devant son fils magistrat, son attitude, dans la maison même, à l’égard de son fils devait peu à peu, par la force des choses, en être modifiée. Quand les hommes libres furent habitués à rencontrer, dans les