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PRÉFACE

morale ne sauraient suffire. La théorie pure ne s’adresse qu’à la raison de l’enfant, et souvent la dépasse, la pure homélie ne s’adresse qu’à son cœur, et souvent ne l’atteint pas. Dans tous les cas l’enseignement gagnerait à être « pratique » et « positif », c’est-à-dire à manier les exemples concrets, pour déployer devant l’enfant la réalité sociale où il doit agir, et d’où il verrait surgir, en quelque sorte, ses devoirs précis et pressants.

Veut-on par exemple ouvrir les esprits des jeunes gens à la pitié, à la fraternité, au souci de la justice sociale ? On ne se contentera pas de leur dire, d’une manière générale, qu’il y a des malheureux ; on essaiera de leur mettre sous les yeux les différentes formes, les causes et les conséquences de la misère : on leur parlera du chômage et du sweating-system ; on leur fera toucher du doigt les dures arêtes de notre organisation économique. Veut-on leur inculquer le sentiment du devoir professionnel ? Qu’on leur prouve, et non pas seulement par la vieille fable des membres et de l’estomac, mais par quelques indications précises et concrètes sur l’accroissement du nombre des professions spécialisées, l’importance chaque jour croissante de la division du travail. On leur fera alors mieux comprendre comment, dans une société dont la prospérité repose sur le travail ainsi divisé, celui qui ne s’acquitte pas consciencieusement de sa fonction sociale commet une sorte d’abus de confiance, et contribue pour sa part à détraquer toute la machine. Qu’on ne néglige en un mot aucune occasion de renseigner les enfants sur les caractères propres de la civilisation qui les a pour ainsi dire engendrés et qu’ils doivent à leur tour faire vivre et progresser.

Mais pour les élever aisément jusqu’à ce point de