découvre, l’image de ce travailleur intégral qu’avait prôné Hegel, capable de développer harmonieusement toutes les puissances de l’homme[1]. De là les doubles résonances sentimentales, — à la fois colère et pitié, — de tant de « constatations pures et simples », exploitées par le socialisme ; il lui suffit de les énoncer : la discordance éclate d’elle-même entre la vie imposée à la grande masse et les droits que la conscience moderne reconnaît à tous.
C’est en ce sens qu’on a pu dire du socialisme qu’il était l’héritier légitime de l’individualisme, qu’il était l’individualisme même, mais « logique et complet[2] ». Que les rapports d’affaires consacrés par nos lois annulent en fait, pour le plus grand nombre, les droits primordiaux de la personne, qu’ils forcent beaucoup d’êtres humains à se vendre eux-mêmes en détail, ni plus ni moins que des marchandises, et les excluent de la civilisation digne de ce nom, c’est ce que le socialisme ne se lasse pas de démontrer[3]. C’est cette démonstration qui est le nerf moral de sa propagande : c’est, de plus en plus, en insistant sur cet « aspect éthique » qu’il s’efforce d’entraîner les masses. « Le peuple doit éprouver, disait Liebknecht[4], que le socialisme n’est pas seulement la réglementation des conditions du travail et de la production, qu’il ne se propose pas seulement d’intervenir dans les fonctions économiques de l’État et de l’organisme social, mais qu’il a en vue le développement le plus complet de l’individu… et qu’il fait consister l’idéal civil et social à réaliser en tout homme autant que possible l’idéal de l’humanité. »
L’attitude que nous adopterons à l’égard des efforts actuels de la démocratie ne dépendra donc pas seulement des faits que