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CHAPITRE III

LA HIÉRARCHIE DES CASTES ET LE SACERDOCE


La domination de l’antique exclusivisme familial explique pourquoi les castes hindoues refusent de se pénétrer : reste à expliquer pourquoi elles nous apparaissent classées et comme étagées.

En effet, qui dit opposition ne dit pas superposition. Une société peut demeurer divisée en corps fermés sans que ces corps acceptent d’être hiérarchisés. Et sans doute, il est difficile que des corps coexistants s’en tiennent exactement au même niveau, comme il est difficile qu’ils conservent les mêmes attributions : du moment qu’une certaine vie commune les unit, ils ne peuvent manquer à la longue de se classer plus ou moins vaguement, en même temps que de se spécialiser. C’est ainsi que là même où la primitive opposition des clans subsiste, il n’est pas rare qu’une hiérarchie se dessine. Chez les Écossais, on voit certains clans se subordonner aux autres[1]. Chez les Israélites, il y a des tribus généralement méprisées ; d’autres, comme Ephraïm, jouissent d’une considération toute particulière[2]. Mais qu’il y a loin, de ces linéaments, à la

  1. C’est cette subordination qui a fait croire à tort que le régime féodal se rencontrait en Écosse. Cf. Conrady, Geschichte der Clanverfassung in den Schottischen Hochlanden. Leipzig, Duncker, 1898, p. 12-21.
  2. M. Buhl, qui rappelle ces faits (Die Socialen Verhältnisse der Israeliten, p. 35-40), en conclut que l’organisation primitive des Hébreux était foncièrement aristocratique. La conclusion est contestable. Cf. Année sociol., III, p. 347.