Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/283

Cette page n’a pas encore été corrigée

origine rituelle. « Il n'y a peut-être pas, dit justement à ce propos M. Oldenberg 535, un exemple plus caractéristique de ce qu'a de particulier la façon de penser des Indiens : cette idée, qui n'a pas son origine dans la contem­plation du monde sensible, mais dans la méditation sur la puissance du texte des Védas et du métier de prêtre, on la voit par degrés se pousser vers les sommets, jusqu'à ce qu'enfin elle donne son nom à la conception la plus haute que l'esprit puisse embrasser. »

La philosophie qui s'élaborait autour de ce noyau devait exercer son attraction sur ceux-là mêmes qui cherchent le plus résolument à secouer, avec la servitude rituelle, la domination brahmanique. Nous avons vu que le boud­dhisme n'échappe pas à cette règle 536. S'il utilise pour sa propagande des contes populaires, il reste fidèle à des habitudes intellectuelles quasi scolastiques. Et sa dialectique suit la pente où la tradition brahmanique lançait l'esprit hindou. Sous la mainmise de cette tradition, tout converge, en Inde, vers le panthéisme.

Panthéisme très différent, on l'a bien des fois remarqué 537, de celui que l'Occident nous présente. Chez nous, d'une manière générale, le panthéisme est actif, et progressiste. Il dit oui à la vie. Il se réjouit de reconnaître, dans l'évolution, l'esprit qui monte. Il invite l'homme à faire effort pour aider à cette ascension. Là-bas au contraire il semble qu'on travaille à dissoudre l'esprit dans l'Océan de l'être. On détourne l'homme de l'effort appliqué à la vie. Ce qu'on lui fait redouter par-dessus tout, c'est de revivre.

Cet idéalisme nihiliste traduit-il, comme on l'indique quelquefois, l'im­pression d'accablement que devaient laisser aux hommes non seulement la cruauté des fléaux