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La puissance d'une tradition qui paraissait adéquate à la tendance de l'esprit hindou à classer et à isoler devait faire échec, observe M. Fick 487, au souci de la commodité.

Les villes rassembleront différentes castes d'artisans, chacune parquée seulement dans son quartier ou dans sa rue. Les conditions sont alors réunies pour le développement du commerce.

Mais si l'on veut prévoir quelles limites ce développement rencontrera, il faut se rappeler comment sont nées et comment sont mortes la plupart de ces villes hindoues, dont la littérature nous décrit les splendeurs avec tant de complaisance. La plupart ne sont d'abord que des camps retranchés pour les despotes, grands et petits, qui prélèvent l'impôt sur ces populations incapables de se coaliser pour se défendre. Des camps qui deviennent des cours et qui, pour la gloire du prince et les besoins de sa suite, réclament un nombre croissant de boutiques et d'ateliers. Ici plus manifestement qu'ailleurs, c'est en effet pour le service des grands que les arts et métiers se concentrent et s'organisent. « Presque tous les capitaux mobiles des empires, écrit S. Maine 488, sont aspirés vers un centre temporaire, qui devient ainsi l'unique siège des arts décoratifs et des manufactures qui exigent une certaine délicatesse de main-d'œuvre. Quiconque prétendait appartenir à la classe supérieure des artisans prenait son métier ou ses outils et suivait le cortège royal. D'où la splendeur des capitales de l'Orient, conséquence de la multiplication des formes que prenait l'industrie, à mesure que la richesse affluait vers les cours. » De là devaient rayonner et là devaient converger les caravanes escortées ; là devaient prospérer et croître en importance sociale non pas seulement les cas­tes d'artisans, mais ces castes de