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héréditaire des qualités acquises est sujette à caution, mais ceux-là mêmes qui la défendent se gardent aujourd'hui de compter, au nombre de qualités transmissibles, ces ensembles d'habitudes complexes, et par là même instables, qui constituent une habileté technique. Au surplus, les observations auxquelles l'Inde elle-même a donné lieu, lorsque les nouveautés introduites par l'administration anglaise permirent à des rejetons de castes différentes de « concourir » en cherchant leur voie et en donnant leur mesure, ne nous ont nullement permis de conclure que le régime ait engendré, pour les divers ordres d'activités, des races spécialement douées et portant, dans leurs innéités, un trésor d'hérédités séculaires 462.

Mais si l'on veut dire seulement que l'Inde, par cela même qu'elle a fermé toutes les autres possibilités, a dû obtenir, de cette éducation domestique qui transmet de génération en génération les secrets du métier, le maximum de rendement, rien n'est plus vraisemblable. Et il est permis de faire honneur au régime des castes de l'adresse proverbiale des artisans hindous.

Ce ne sont pas seulement, en effet, les dons de son sol, ce sont aussi les œuvres de ses artisans qui ont fait durer, pendant des siècles, la réputation de l'Inde.

Des résultats merveilleux que ceux-ci obtiennent avec si peu de ressour­ces, tous les voyageurs se sont étonnés, de Mégasthène à Jacquemont. Parlant des ouvriers des villes : « C'est au milieu de son petit étalage, nous dit celui-ci 463, que chacun travaille, accroupi comme un singe, et comme un singe aussi non moins adroit de ses pieds que de ses mains. Leurs outils sont d'ailleurs détestables, et s'il n'en avait pas d'autres pour travailler, le plus habile ouvrier d'Europe ne saurait pas s'en servir à beaucoup près aussi adroitement. » « L'orfèvre hindou, écrit un autre voyageur 464, é