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LES EFFETS

admis qu’au seuil de l’école publique : ils ne doivent pas dépasser la véranda 325.

Est-il étonnant, après tant d’obstacles matériels ou moraux, que les membres des basses castes ne s’élèvent pas dans l’échelle des fonctions aussi rapidement qu’on aurait pu l’espérer ? Très peu obtiennent, nous dit-on, les places que le gouvernement ouvre au concours de tous. Dans les fonctions d’employés des postes ou d’instituteurs, a fortiori dans celles de juges, on rencontre en immense majorité les représentants de quelques castes favorisées, toujours les mêmes. Au Bengale par exemple, sur 1 235 postes appointés par le gouvernement anglais, 1 104 sont accaparés par trois castes : Brahmanes, Baidyas, et Kayasths. Dans la plupart des provinces, des proportions analogues se retrouveraient 326.

Il reste donc vrai que les descendants des « philosophes » occupent encore aujourd’hui, dans les carrières libérales, une place privilégiée. Les jeunes Brahmanes en quête d’un métier se souviennent que l’étude fut le privilège de leur caste. Ils se portent de préférence vers les fonctions intellectuelles, et beaucoup y réussissent. Mais ces succès sont-ils la preuve de supériorités intellectuelles héréditaires ? On en doute légitimement, si l’on constate que des succès analogues ne sont nullement refusés aux membres des autres castes. Pendant longtemps, les Radjpoutes n’ont pas brillé dans les situations qui demandent de la culture ; c’est que beaucoup d’entre eux mettaient en quelque sorte leur point d’honneur à ne pas s’instruire. Mais le jour où ils se sont décidés à sortir de leurs tentes, on n’a pas vu que les descendants de la race guerrière fussent fatalement moins aptes à l’étude. Deux des « Babous » les plus fameux de la haute cour du Bengale, Prasanna Chandra Roy et Saligram Sing sont de caste radjpoute. Dans le service judiciaire

I. Census of India, igoi. India, vol. I, p. i6a sqq. a. Ibid. p. 217, 230.