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LES EFFETS

refluent vers l’agriculture, d’autres se disputent les métiers inédits dont la civilisation anglaise entraîne la création. Un bon nombre aspire à devenir fonctionnaires. C’est un des espoirs qui contribuent à remplir, d’une foule chaque jour plus pressée et plus bigarrée, les écoles chaque jour plus nombreuses. Si le gouvernement anglo-indien n’ouvre pas aux Hindous, aussi largement qu’ils le voudraient, les hauts emplois du civil service, du moins ne tient-il aucun compte, pour la distribution des fonctions qu’il leur offre, de leurs distinctions originelles. Il prétend oublier les différences de races comme les différences de religions. Dans cette même société dont le régime des castes immobilisait naguère tous les éléments, un régime de concours, qui en mobilise une grande partie, est brusquement ouvert 324. Considérons donc, après cette espère de mobilisation, les fonctions que s’approprient et les rangs qu’atteignent les membres des différentes castes ; nous obtiendrons peut-être ainsi une démonstration de leurs qualités spécifiques.

Pour les qualités militaires, ceux qui prétendent descendre de la caste des Kshatriyas les possèdent sans aucun doute : mais en ont-ils le monopole ? Il y a longtemps qu’on a remarqué, au contraire, que l’armée anglo-indienne était un rendez-vous pour toutes les castes, et que les plus basses, suivant l’expression de Jacquemont « s’élèvent en prenant le mousquet ». Du moins, si on leur interdit d’abord de prendre rang dans l’armée du Bengale, elles firent librement partie de l’armée de Madras et de celle de Bombay. Aujourd’hui elles reçoivent toutes dans leurs cadres non seulement des membres des basses castes, mais des membres des tribus « sans castes » ; et leurs chefs s’en déclarent fort satisfaits. Ainsi le Brahmane ne fait pas moins bonne figure sous les armes que le Kshatriya, le Vaiçya que le Brahmane, l’aborigène que

I. V. l'ouvrage cité de Pramatha Nath Bose, passim.