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LES EFFETS

des Mundas, qui constituent non pas des castes mais des tribus encore à demi sauvages, nous placerons les Musahars et les Chamars, de la caste des tanneurs ; au-dessus de ceux-ci les Bauris, les Binds, les Kervas, qui sont des pêcheurs ; puis les Goalas, pasteurs, et les Kurmis, cultivateurs ; et enfin, les Khatris et les Babhans, commerçants et propriétaires appartenant aux plus hautes classes. Mesurons maintenant les proportions nasales des sujets ainsi rangés. Nous constaterons que les Khatris ont incontestablement le nez moins large que les Kurmis, les Kurmis que les Bauris, les Bauris que les Chamars, les Chamars que les Kols ou les Mundas. En un mot, il nous apparaîtra que la hiérarchie anthropométrique est parallèle à la hiérarchie sociale, et nous pourrons conclure « presque sans paradoxe, que, dans l’Inde orientale, le rang social d’un homme varie en raison inverse de la largeur de son nez » 307.

Que demander de plus ? Nos anthroposociologues peuvent être satisfaits. Ce que l’Europe, bouleversée par la démocratie, leur refusait, l’Inde, comme pétrifiée par le régime des castes, le leur accorde généreusement. À défaut de l’indice céphalique, l’indice nasal leur a permis de noter, entre les différences physiques et les différences sociales, des correspondances étrangement précises.

Que vaut cependant toute cette démonstration ?

Si elle ne s’appuyait que sur les « impressions » des voyageurs, ou même des habitants de l’Inde, il serait trop aisé de l’ébranler. D’abord, lorsqu’il s’agit de prouver que des différences proprement biologiques se cachent sous les différences sociales, on ne peut qu’à moitié se fier à l’apparence, à l’aspect général, à la physionomie des

I. The Tribes and Castes of Bengal, Tome I, p. 34 •