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déjà que je me mettais en haleine pour t’aller chercher dans tes courses ou dans tes châteaux. Jusqu’à présent les unes n’ont été qu’en Allemagne et les autres en Espagne. Quelque part que tu sois, je te baise comme nous nous baiserons un jour.


Ce 12. — Voilà mon ambassade revenue de chez Sa Majesté le roi Damel. Il me cède en toute propriété le terrain que je lui ai demandé et j’ai entre les mains le traité signé de lui ; mais il a fait courir après mes gens pour leur dire que tout était rompu et qu’on lui avait dit que, s’il cédait ce pays-là, il mourrait dans l’année. Je n’en prendrai pas moins possession de mon nouvel empire en feignant d’ignorer le dédit et de m’en tenir à la signature du monarque. Je prends cependant la précaution de lui renvoyer mes ambassades avec une belle lettre et le beau présent qu’il ne connaissait que par un simple récit. J’espère que l’or et l’argent l’éblouiront au point de l’aveugler sur la mort qui le menace et que, pour une selle et une housse brodée et deux ou trois assiettes d’argent, je me trouverai en possession d’une petite province. Je tâcherai que le roi de France me l’accorde en toute souveraineté et je commencerai à compter parmi les princes africains et toi parmi les princesses. En attendant que tu sois une reine noire, je te baise comme la plus jolie des blanches.


Ce 13. — Voici encore des nouvelles du Sénégal et toujours plus tristes. Ces pauvres revenants de Galam meurent comme des mouches, mais ce n’est encore rien auprès de mes jardiniers. J’en ai eu quatre cette année : deux sont morts et c’étaient les