Page:Boudin - La Fameuse Comédienne, 1688, édition Bonnassies, 1870.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

çon qu’elle aime fort, et qui sert à dissiper ses chagrins. Sa maison de Meudon, qu’elle a rendeuë fort propre par la despense qu’elle y a faite, luy est d’un grand secours. Elle y passe une partie de l’année, c’est-à-dire les jours qu’elle ne joüe pas, qui sont en assez grand nombre par l’inutilité dont elle est présentement dans la Troupe, où elle ne fait plus aucune figure depuis la jonction des deux troupes ; et, sans les pièces de son mary, où elle est encore inimitable, elle ne paroistroit plus qu’avec desagrement.

On peut aisement par là remarquer une certaine justice qui se trouve dans l’ordre des choses, et qui nous fait presque tousjours esprouver ce que nous avons fait souffrir aux autres. Les duretez qu’elle a eues pour un mary d’un merite singulier luy sont rendeuës avec usure par un autre, qui est le rebut du genre humain ; et, pour surcroist de déplaisir, elle se voit mesprisée de ses compagnes, qui s’estimoient autrefois trop heureuses d’avoir sa faveur.

Neantmoins, l’espoir de faire de son fils un homme de conséquence, en luy donnant tout le bien qui appartenoit à sa filïe, dont elle s’estoit rendeue tutrice par son adresse, l’auroit consolée de toutes ses disgrâces, si le succès eust respondeu à ses intentions ; mais sa fille ne s’est pas trouvée dans ces dispositions, et, malgré le degoust que la Guerin a tasché de luy inspirer