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porte pas à la cruauté, si l’adroite confidente, qui ne se fioit pas trop à la parolle que la Demoiselle luy avoit donnée d’estre severe, ne fust veneue troubler leur conversation. Du Boulay en fut si outragé qu’il sortit aussytost sans prendre congé de personne ; ce qui déconcerta fort la Moliere.

La Chasteauneuf estoit trop habile en ces sortes de matières pour n’avoir pas compris d’abord ce qui avoit causé la fureur de ce départ précipité. Elle feignit pourtant de vouloir s’en esclaircir, et demanda à la Moliere à quel point elle en estoit avec son amant. La Demoiselle, qui avoit toute confiance en la Chasteauneuf, luy dit à peu près les choses comme elles s’estoient passées : ce qui luy fit voir qu’il estoit homme plus difficile à surprendre qu’elle ne s’estoit imaginé. C’est pourquoy elle recommanda à la Moliere de se tenir ferme sur le pied de la vertu, et qu’elle voyoit sa fortune en assez bon chemin, pourveu qu’elle n’y mist point d’obstacle par sa facilité ; surtout qu’elle évitast de se trouver seule avec Du Boulay, parce qu’il est dans la vie des momens fascheux dont on ne peut respondre, et. que la prudence ne vouloit pas qu’on se fiast trop à soy dans ces sortes d’occasions. La Moliere luy confirma la promesse qu’elle luy avoit faite de ne rien permettre à Du Boulay, sans les formalitez dont elles estoient conveneues, et que, du