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pouser, si elle se menageoit avec esprit ; que cela n’estoit pas sans exemple, et que tout le secret estoit de l’engager d’une maniere qu’il ne pust s’en deffendre. La Moliere entra avec feu dans ses sentimens, et l’envie de devenir femme de Du Boulay luy fit trouver aisée une chose qui luy eust pareu très-difficile, pour peu qu’elle eust consulté sa raison. Mais l’ambition luy faisoit fermer les yeux sur la justice qu’elle auroit de se rendre à elle-mesme ; elle convint avec sa confidente de ce qu’il falloit faire pour réussir dans cette entreprise. La Chasteauneuf luy dit que le plus seur estoit d’estre cruelle et de luy refuser jusqu’à la plus simple faveur ; que, neantmoins, il falloit que ce fust d’une maniere qu’il eust lieu de croire que c’estoit sa seule vertu qui donnoit des bornes à la tendresse qu’elle avoit pour luy. La Moliere approuva ce conseil, et, lorsque Du Boulay venoit chez elle, elle le recevoit d’un air si obligeant qu’aux dernieres preuves d’amour près, il ne pouvoit se plaindre d’elle. .

Cependant cela ne suffit pas pour un homme qui s’estoit flatté de tout obtenir aisement ; il s’appercevoit que l’intention de la Demoiselle estoit de l’amuser, et la peur qu’il eut d’en estre la duppe le détermina à vouloir s’en expliquer. Il fut, une après-disnée, chez elle, dans ce dessein. Il trouvoit qu’elle se paroit extraordinairement pour une veuve, et, ayant pris ce