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IV

J'ai dit, au cours de ce travail, que la présomption tirée du lieu de la découverte ne prendrait pas une importance de tout premier ordre dans la discussion. A mon sens les ambulants de la peinture et de la gravure étaient fort nombreux au moyen âge; ils savaient que, en l'état des esprits, avec la crainte perpétuelle de mort dans laquelle vivaient les gens des campagnes, une image préservatrice trouvait facilement son débit. Je dirai longuement ailleurs, avec preuves, pourquoi ces images se sont moins gardées en France, où elles étaient nées, tandis que les Allemands les ont religieusement sauvées de destruction. C'est que, chez nous, l'image était plus personnelle, qu'on l'appliquait à la décoration des murailles pour se préserver de mort violente ou de peste, qu’on la causait dans ses habits en manière d'amulette. Plu: rares étaient les riches qui la logeaient dans le coffret de mariage[1] ou dans l'armoire. En Allemagne, les couvents dépendant de Citeaux recevaient les images, apportées du chef d'ordre par les religieux voyageurs; ils les collaient dans les manuscrits de la bibliothèque, non sans les avoir dotées parfois d’une écriture manuscrite, d'une estampille gravée ou d'une mention de propriété quelconque[2]. L'abbaye de Tegernsee, aujourtd'hui considérée comme le plus grand centre de la taille de bois dans les

  1. M. Jules Protat possède un coffret de mariage du XVe siècle, avec une image bourguignonne à l'Annonciation de Thielmann Kerver publiée en 1502, et qui est grave par Pigouchet; mais elle est de dimensions doubles.
  2. Cf. W. Schmidt, Druckdenkmale. Plusieurs pièces portent des mentions de possession de Tegernsee. J'espliquerai plus tard ce que valent ces indications.