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« Aux yeux de l’Éternel puissé-je trouver grâce !
Nous dit-il. Mais souffrez qu’un repas vous délasse ;
Reposez-vous, seigneurs. » Puis, appelant Sara :
« Pétris une galette et présente la crème !
L’hôte qui m’a comblé par cet honneur suprême,
Ma vigne le réjouira. »

Lorsqu’Abraham, devant sa tente hospitalière,
A genoux, eut lavé nos pieds blancs de poussière,
Il fit rôtir pour nous le plus gras de ses veaux.
Nous mangeâmes en paix à l’ombre des grands chênes,
Tandis que sous nos yeux, dans les moissons prochaines,
Brillait l’éclair aigu des faux.

Lui, se tenait debout ; repus, nous lui parlâmes.
« Demain tu pourras voir tourbillonner les flammes
Sur Sodome et Gomorre. Elles exècrent Dieu,
Et nous sommes venus pour en faire justice.
Nous irons trouver Loth. Il faut qu’on l’avertisse
De fuir le déluge de feu. »

Abraham eût voulu, lui qui savait me plaire,
En faveur de Sodome apaiser ma colère.
« Frapperez-vous, dit-il, les bons et les méchants ?
Si pourtant l’on trouvait dix justes dans la ville… »
Mais je fus sans pitié pour cette engeance vile ;
C’étaient d’abominables gens.