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ADAM


L’heure vint assez tôt où nous fûmes instruits
De toute la grandeur de notre destinée.
Nous goûtâmes en paix la fraîche matinée
Avant que, pour tracer notre profond labour,
Il nous fallût gémir sous la chaleur du jour.
Puisque l’Éternel Dieu nous fit des heures calmes
Sous l’ombre frémissante et légère des palmes,
Parmi les fruits vermeils et les buissons de fleurs,
Souvenons-nous parfois, en essuyant nos pleurs,
Que dans ce beau jardin le Seigneur fut notre hôte ;
Mais bénissons pourtant l’heureuse et noble faute.


ÈVE


Je ne puis oublier qu’il nous faudra mourir.


ADAM


Ô chère femme, un jour nous sentirons tarir
Dans nos corps desséchés la sève nourricière.
Poussière, nous devons retourner en poussière.
Mais comme les épis sortent drus et pressés
Des grains que d’une main puissante j’ai lancés,