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« Ce qui fait frissonner mon âme, est-ce la mort ? »
Pensai-je ; et mon désir fut mêlé de remords.
Certes, je respectai la pudeur de l’épouse ;
Et je vis même avec une haine jalouse
Les arbres tressaillir, les bêtes s’approcher…
Que ne pouvais-je au fond de mon cœur te cacher !
Tels, nous fûmes tous deux pris d’une sainte honte.
Mais nous ne péchons point, quand notre amour surmonte
Cette pudeur qui donne aux caresses leur prix…
Nous sommes un seul corps, femme ; et tu l’as compris.
Lorsque Dieu de mon flanc t’a lui-même tirée,
N’était-ce pas afin qu’ardemment désirée
Tu m’emplisses le cœur d’un indicible émoi ?
Ne t’a-t-il pas pétrie uniquement pour moi ?
En écoutant l’arrêt de l’inflexible Juge,
Je sentis que l’amour serait mon seul refuge ;
Et, lorsqu’il nous chassa, mon malheur fut moins grand
Puisque je t’emportais dans mes bras en pleurant !


ÈVE


Même en ces jours amers je ne fus point blâmée.
Tu serrais contre toi l’épouse bien aimée,
Plus tendrement qu’aux jours d’innocence et de paix.
Tu préparais, le soir, un lit de mousse épais ;