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VALA


La nuit vient sur les dieux ; voici le soir des Ases.
Tout va finir. L’amour lui-même est sans extases.
L’adolescent n’a point d’ami qui lui soit cher.
Mais une âpre luxure aiguillonne la chair ;
L’homme n’a plus pitié de l’homme ; et l’on se cache
Pour enterrer les morts. C’est l’âge de la hache.
Pas une fleur n’éclot. Sur le triste univers
Silencieusement passent trois longs hivers ;
La neige monotone et stérile tournoie ;
Le soleil appauvri ne verse plus la joie.


ODIN


Hélas !


VALA


                     Mais tout à coup le grand aigle du Nord
Au-dessus d’Yggdrasil entonne un chant de mort ;
Et, tandis que l’oiseau crie avec véhémence,
Le Frêne retentit comme une harpe immense,
Car l’aigle, en secouant ses ailes, fait courir
Des frissons à travers l’arbre qui va mourir.
Au loin, dans la forêt, chante un coq écarlate ;
Un autre à crête d’or, dont la fanfare éclate
En haut du ciel, répond au sombre coq de fer
Qui sanglote parmi les brouillards de l’enfer.