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Car ils aiment la vie en méprisant la mort.
Sur eux plane l’Épée : un jour, tel est leur sort,
Ils seront abattus par cette vierge ailée.
Qu’importe que ce soit demain ? Dans la mêlée,
A l’heure de mourir, leur défaillante voix
Lance le cri de guerre une dernière fois !

Si quelque chef est mort, sa veuve aura des larmes :
Ne vous lamentez pas. Mais qu’on le couche en armes ;
Avec lui soit le glaive, et le noir bouclier.
Que Ton pare son cou d’un précieux collier ;
Que ses chevaux, ses chiens soient livrés à la flamme ;
Que ses plus chers amis accompagnent son âme.
La pique sur l’épaule, il parait endormi ;
Son visage est encor tourné vers l’ennemi…
Mais l’âme va s’enfuir sur les houles sauvages
Pour aborder enfin aux lumineux rivages,
Aux îles de bonheur, vers l’Occident, là-bas !
Elle y retrouvera des jeux et des combats,
De princières amours, les baisers d’une reine,
Des manteaux d’écarlate et des lances de frêne,
De splendides coursiers, plus légers que les vents,
Des bardes comme moi, des harpistes savants
A dérouler une ample et merveilleuse histoire,
Des chaudrons pleins de viande et des cornes à boire.