Page:Bouchor - Les Symboles, première série.djvu/233

Cette page n’a pas encore été corrigée


Il vit l’âpre Médie, et de brûlantes plaines
Où ne résonne, plus la langue des Hellènes,
L’Inde, et mille peuples puissants,
Et l’Arabie où l’air est saturé d’encens.


LE POÈTE


Je le vois qui chemine avec son lent cortège.
Un splendide rideau de pourpre le protège
Contre le ciel ardent. Il feint de sommeiller,
Le coude sur un mol et profond oreiller,
La mitre au front, vêtu comme un roi de Lydie ;
Mais il rêve ; son cœur est plein de mélodie.
Le roulis de son char le berce ; et, chaque fois
Qu’il anime du geste ou flatte de la voix
Ses panthères au poil soyeux, souples et fières,
On voit, sous les longs cils qui frangent ses paupières,
Une grâce divine alanguir ses yeux noirs.
De légères vapeurs montent des encensoirs ;
Le cortège retient ses clameurs triomphales
Et l’on entend frémir doucement les cymbales.
Les nymphes de Nysa suivent le bien aimé.
Pan l’accompagne, Pan qui jadis a charmé
Par la flûte sa libre et radieuse enfance.
Avec le jeune Amour Aphrodite s’avance,
Émue, et ses beaux yeux baissés pudiquement,
Près de Dionysos, son virginal amant.