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LE POÈTE


Il grandit. La splendeur de ses membres divins
Rayonna dans les bois et les sombres ravins.
Après avoir empli nos forêts de tumulte,
Le dieu qui crie en moi, le dieu par qui j’exulte
Un jour donna la vigne au roi de ce pays.
Dionysos, riant des pasteurs ébahis
Qui s’empressaient autour de ce danseur étrange,
Foula de ses pieds nus la première vendange ;
Et pour tous le profond cratère fut rempli
De pur enthousiasme ou de suprême oubli.


LE CHŒUR


Alors une clameur sortit de mille bouches ;
Et, se précipitant avec des bonds farouches,
S’entrechoquant, heurtant leurs fronts,
Les Satyres cornus et les pesants Silènes
Accoururent des bois, des montagnes, des plaines
Pour se mêler aux vignerons.

Un bouc à longue barbe allait brouter sa vigne
Quand soudain le vieux roi s’avança d’un air digne,
Bien que trébuchant à demi,
Lui plongea dans la gorge une lame affilée,
De sa peau fit une outre, et sur l’outre gonflée
Dansa d’un pied mal affermi.